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Haïti connait une nouvelle flambée de choléra

Le nombre de cas de choléra continue d’augmenter en Haïti, qui n’avait pas connu d’épidémie depuis 2019. Médecins sans Frontières intervient sur le terrain en concertation avec l’État haïtien pour répondre à la demande de traitements.

  • 21 octobre 2022
  • 4 min de lecture
  • par Laura Louis
Un travailleur de santé à Cité Soleil, touchée par l'épidémie de choléra. Crédit : Alexandre Marcou/ MSF
Un travailleur de santé à Cité Soleil, touchée par l'épidémie de choléra. Crédit : Alexandre Marcou/ MSF
 

 

En date du 17 octobre 2022, il y a eu 606 cas suspects, 66 cas confirmés, 248 hospitalisations et 22 décès dans des centres de traitements de choléra en Haïti. L’annonce officielle de la résurgence de la maladie a été faite le 2 octobre 2022 par le ministère haïtien de la Santé publique. Les cas suspects ont été repérés dans deux communes du pays : Port-au-Prince (Decayette) et Cité-Soleil (Brooklyn). Cette nouvelle est survenue dans un contexte où le pays est paralysé par une crise de carburant. L’accès à l’approvisionnement de l’eau potable et des produits de premières nécessités devient un parcours du combattant.

Le choléra est une maladie diarrhéique provoquée par l’ingestion d’eau ou d’aliments contaminés par la bactérie vibrio cholerae. Il a été introduit en 2010 en Haïti par des soldats népalais des Nations Unies. Du 21 octobre 2010 au 4 février 2019, il avait engendré près de 10 000 décès et plus de 820 000 personnes ont été affectées, selon l’UNICEF. Depuis février 2019, aucun cas de choléra n’a été déclaré en Haïti. Il était même question de l’élimination de la maladie. Pour l’heure les recherches n’ont pas encore montré les causes de sa résurgence. Il existe toutefois des hypothèses qui restent à vérifier.

« L’actuel manque d’accès à l’eau potable et le manque de traitement des eaux usées sont deux facteurs problématiques. »

Nous avons parlé à Mumuza Muhindo, chef de mission de Médecins Sans Frontière en Haïti. Selon lui, au 12 octobre 2022, MSF disposait de 189 lits dans quatre centres de traitements (CTC) dans les pays. À la même date, environ 400 patients ont été traités toujours selon Mumuza Muhindo.

Choléra Haiti
L'épidémie de choléra touche également les plus jeunes enfants.
Crédit : Alexandre Marcou/ MSF

Comment les premières interventions se sont déroulées, vu que depuis février 2019, aucun cas de choléra n’a été déclaré dans le pays ?

Nous observons une stabilisation des arrivées de patients atteints de choléra. Néanmoins, il est impossible de savoir combien de personnes sont réellement malades, car certains quartiers ne sont pas accessibles, et des patients n’arrivent pas à se rendre dans les structures de santé. Depuis l’arrivée des premiers cas suspects dans nos structures, nous avons traité plusieurs centaines de patients dans nos quatre centres de traitement choléra installés à Turgeau, Cité Soleil, Champ de Mars et Carrefour. A Cité Soleil, nous avons aujourd’hui une capacité de 120 lits et à Turgeau de 25 lits. Un CTC a été ouvert par MSF au sein de l’hôpital de Messie avec une capacité de 40 lits. De plus, des actions communautaires ont été menées avec notamment la chloration des points d’eau dans les zones cibles, comme à Carrefour Feuille, où nous avons également commencé à sensibiliser les populations sur les mesures barrières.

La maladie a resurgi dans un contexte où les activités sont paralysées à cause de la rareté des produits pétroliers et de l’insécurité qui sévit dans le pays, notamment dans les zones où le ministère de la Santé publique a déclaré les premiers cas. Comment parvenez-vous à faire la prise en charge des personnes infectées ?

Pour le moment, nous arrivons à assurer nos services, et nous les avons même augmentés pour faire face aux besoins, mais nous anticipons de grosses difficultés si la situation ne s’améliore pas. Les cargaisons médicales et intrants nécessaires au fonctionnement des centres MSF sont bloquées au port et inaccessibles à cause de la situation actuelle. Nous risquons aussi un engorgement de nos propres centres de santé avec la fermeture des autres hôpitaux : les options pour les patients sont plus réduites et risquent d’affluer dans nos centres. Nous ferons de notre mieux pour traiter les patients dans nos centres de santé mais nos capacités d’accueil ne sont pas extensibles à l’infini. Nous sommes aussi obligés d’organiser des navettes pour acheminer toutes nos équipes sur leur lieu de travail sachant que les transports en commun ne sont plus fonctionnels et que la situation sécuritaire rende la circulation dangereuse.

En termes de préparation de la population, pouvez-vous nous dresser une analyse comparative de la situation actuelle à celle de 2010 ?

C’est difficile de comparer avec 2010 car nous n’avons pas encore assez d’informations et il est trop tôt pour tirer des conclusions. L’actuel manque d’accès à l’eau potable et le manque de traitement des eaux usées sont deux facteurs problématiques. En revanche, le travail effectué par le ministère de la Santé publique et des populations et d’autres organisations humanitaires et médicales lors de l’épidémie déclenchée en 2010 a permis à la population de connaître les gestes barrières, ce qui permettra de mieux réagir dans le cas d’une nouvelle flambée. Le Ministère a également communiqué très vite sur la résurgence : c’est un autre élément très important.

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