Vaccinées grâce à Gavi il y a vingt-cinq ans, deux jeunes femmes rwandaises regardent l’avenir avec confiance

Alors que Gavi célèbre ses 25 ans, la première génération de “bébés Gavi” devient adulte et participe activement à la vie de leurs communautés et de leur pays.

  • 1 juillet 2025
  • 5 min de lecture
  • par Hudson Kuteesa
Marie Germaine Dusingize, au travail au centre de santé de Kinyinya. Crédit : Hudson Kuteesa
Marie Germaine Dusingize, au travail au centre de santé de Kinyinya. Crédit : Hudson Kuteesa
 

 

Marie Germaine Dusingize est née il y a 25 ans, à une époque où le programme de vaccination du Rwanda commençait à s’élargir. Elle en a été l’une des premières bénéficiaires. Aujourd’hui, elle est infirmière dans un centre de santé du quartier de Kinyinya, à Kigali, où elle accompagne des femmes enceintes et des nourrissons — leur proposant les mêmes vaccins qui l’ont protégée lorsqu’elle était enfant.

Neonatal medics at the University Teaching Hospital of Kigali (CHUK) attending to an infant. Credit: CHUK
Des médecins néonatals de l’Hôpital universitaire de Kigali (CHUK) prodiguent des soins à un nourrisson.
Crédit : CHUK

Dernière d’une fratrie de sept enfants originaires de Nyamasheke, un district situé à l’extrême ouest du Rwanda, Dusingize est née l’année précédant le début du soutien de Gavi, l’Alliance du Vaccin, au système de santé rwandais. L’Alliance avait été créée pour élargir l’accès aux vaccins déjà disponibles et introduire de nouveaux vaccins — souvent sous-utilisés — dans les pays à revenu faible. Au Rwanda, le changement a été rapide : la couverture vaccinale pour la troisième dose du vaccin contre la diphtérie, la coqueluche et le tétanos (DTC3), indicateur de référence pour évaluer les taux de vaccination, est passée de 77 % en 2001 à 99 % en 2006.

En un quart de siècle de partenariat avec Gavi, le Rwanda a intégré plusieurs nouveaux vaccins à son programme national, notamment le vaccin pentavalent (une version améliorée du vaccin DTC, avec l’ajout de l’hépatite B) en 2002, le vaccin antipneumococcique conjugué (PCV), qui protège contre la pneumonie et la méningite, en 2009, le vaccin contre le papillomavirus humain (prévenant le cancer du col de l’utérus) en 2011, le vaccin contre le rotavirus en 2012, et le vaccin combiné contre la rougeole et la rubéole en 2013. Grâce, en grande partie, à l’augmentation de la couverture vaccinale chez les enfants, le taux de mortalité des moins de cinq ans est passé de 185 décès pour 1 000 naissances vivantes en 2000 à 40 décès pour 1 000 naissances en 2023.

Hassan Sibomana, directeur de l’unité des programmes de vaccination au Centre biomédical du Rwanda (RBC), souligne que Gavi, l’Alliance du Vaccin, a joué un rôle essentiel dans le renforcement du programme de vaccination du pays — non seulement en soutenant l’introduction de nouveaux vaccins, souvent sous-utilisés, mais aussi en investissant dans la formation et les infrastructures de la chaîne du froid.

« Beaucoup d’enfants souffraient autrefois de pneumonie, et en mouraient. Mais depuis l’introduction de nouveaux vaccins, ces maladies sont devenues rares. De mon vivant, je n’ai jamais vu quelqu’un atteint du tétanos. Ce sont des maladies presque disparues », confie Dusingize au site VaccinesWork.

Construire l’avenir

La passion de Dusingize pour la médecine est née dès l’école primaire, inspirée par sa sœur aînée. « J’étais toute petite quand ma sœur a terminé le secondaire et s’est engagée dans des études d’infirmière. J’ai su à ce moment-là que je voulais suivre le même chemin », se souvient-elle.

Consciente qu’une carrière dans la santé nécessitait de bonnes bases scientifiques, elle s’est concentrée au lycée sur la physique, la chimie et la biologie, avant d’intégrer le Kibogora Polytechnic pour y suivre une formation en soins infirmiers. Elle y a passé quatre ans, alternant cours théoriques et stages pratiques dans des hôpitaux et centres de santé.

Même si elle a officiellement obtenu son diplôme en 2024, elle explique avoir déjà l’impression d’avoir passé près de trois ans à soigner des patients en tant que stagiaire. Elle est aujourd’hui infirmière à part entière et travaille dans plusieurs services du centre de santé de Kinyinya — notamment celui qui s’occupe de la vaccination des nourrissons.

A front view of Kinyinya Health Centre. Credit: Hudson Kuteesa
Vue de face du centre de santé de Kinyinya.
Crédit : Hudson Kuteesa

Voir la souffrance des patients dans les services hospitaliers ne fait que renforcer, pour elle, l’importance de la médecine préventive.

« Parfois, on ne sait pas de quoi souffre un patient, mais être vacciné donne la confiance de ne pas attraper certaines maladies », explique-t-elle.

« Les choses ont changé — c’est plus facile »

La jeune infirmière dit puiser sa motivation dans la relation avec ses patients — qu’elle soigne une maladie ou qu’elle administre un vaccin à un nourrisson.

« Quand un patient arrive mal en point, reçoit les soins dont il a besoin et repart en disant “Merci beaucoup, que Dieu vous bénisse”, cela me donne la force de continuer. C’est une source de motivation immense pour nous. »

Et en effet, les efforts de Dusingize et de ses collègues ne passent pas inaperçus. Delphine Nyiramana, mère de deux enfants âgée de 25 ans et habitante de Kigali, fait partie des nombreuses personnes reconnaissantes pour l’amélioration de l’accessibilité et de la qualité des soins de santé.

Ses deux enfants — une petite fille de deux ans et un garçon d’un mois et demi — ont tous deux été vaccinés, tout comme elle l’avait été durant son enfance. Mais l’expérience de Nyiramana a été bien différente.

Née à Gisagara, un district rural de la province du Sud, elle se souvient que l’accès aux soins était limité pendant son enfance, faute d’infrastructures et de personnel.

« À l’époque, on pouvait passer des heures dans un centre de santé à attendre d’être pris en charge. Aujourd’hui, les choses ont changé. Il y a plus de personnel, et c’est plus simple », raconte-t-elle.

Elle se dit reconnaissante que les vaccins soient proposés gratuitement, car le coût aurait pu en empêcher certains d’en bénéficier.

« Si les vaccins coûtaient, disons, 20 000 francs rwandais [environ 13,80 dollars US], certaines familles n’auraient pas les moyens de les payer. Le fait qu’ils soient gratuits permet à chaque parent — riche ou pauvre — d’y avoir accès », souligne-t-elle.

Nyiramana sait bien ce que signifie grandir dans la pauvreté : elle n’a pas pu terminer sa scolarité en raison de difficultés financières. Pourtant — ou peut-être justement à cause de cette exclusion — elle rêve un jour d’ouvrir une école pour les jeunes enfants.

« Chaque fois que je suis entourée d’enfants, je me sens heureuse », dit-elle avec le sourire.

Un avenir partagé

En attendant de réaliser son rêve d’ouvrir une école, Delphine Nyiramana tient à offrir à ses propres enfants une éducation de qualité, dans une bonne école privée. Elle souhaite qu’ils deviennent multilingues, pour augmenter leurs chances de réussite professionnelle.

« Parler plusieurs langues, c’est une bonne chose. Je veux que mes enfants puissent communiquer avec beaucoup de gens, y compris des clients », explique-t-elle.

Sa fille de deux ans montre déjà des signes de vivacité peu commune. Elle la décrit comme une enfant curieuse, vive d’esprit et rapide à apprendre.
« Elle est très curieuse, joueuse et joyeuse — surtout quand elle a bien mangé », ajoute-t-elle en souriant.

De son côté, Marie Germaine Dusingize, l’infirmière, continue de consacrer son énergie à bâtir un avenir collectif plus sûr et plus solide. Elle espère avoir un impact durable en contribuant à garantir un accès à des soins de santé de qualité et pérennes.

« Je veux jouer un rôle pour que les citoyens aient non seulement accès aux vaccins, mais aussi une meilleure compréhension de l’ensemble des services de santé auxquels ils ont droit », affirme-t-elle.