COVID long au Bénin : surveiller et soutenir

Malgré la levée des mesures restrictives en 2022, mises en place pour lutter contre la propagation du Coronavirus, le Bénin demeure en état d'alerte. Un véritable dispositif a été mis en place pour continuer à surveiller et soutenir les personnes atteintes du COVID long et présentant différents symptômes.

  • 20 novembre 2023
  • 6 min de lecture
  • par Edna Fleure
Un citoyen vacciné contre la COVID-19 montre sa carte de vaccination. Crédit : Ministère de la Santé du Bénin
Un citoyen vacciné contre la COVID-19 montre sa carte de vaccination. Crédit : Ministère de la Santé du Bénin
 

 

Une affection qui empoisonne la vie

De juin 2022 à juillet 2023, le Bénin a enregistré de nombreux cas de contamination à la COVID-19. Le nombre de cas confirmés est passé de 25 522 en 2022 à plus de 28 000 en 2023. Cependant, les symptômes varient chez les patients fréquentant les centres de traitement laissés ouverts dans chaque département. Au centre de santé de Pahou, le personnel formé dans le cadre de la pandémie organise souvent des séances de sensibilisation, expliquant aux usagers la nature du COVID long et la variabilité des symptômes d'une personne à une autre. Il en va de même pour la vaccination contre le virus, présentée comme « un moyen radical de se mettre à l'abri d'une contamination ».

En effet, de nombreux Béninois vivent difficilement cette période de COVID long. C'est le cas de Vanessa, qui a perdu sa bourse d'études pour l'Allemagne à cause du coronavirus : « J'avais tous les symptômes d'une grippe et quelques jours plus tard, j'étais incapable de me lever du lit. Une de mes amies m'a forcée à aller à l'hôpital, et c'est une fois là-bas que j'ai appris que j'étais atteinte du COVID. Je n'y croyais pas. J'ai pourtant reçu les deux doses de vaccin. »

Être vacciné contre la COVID-19 réduit de moitié le risque de développer le COVID long, selon une vaste étude publiée dans JAMA Internal Medicine.

« Psychologiquement, cela me perturbe beaucoup. Même si j'ai reçu le traitement et certains symptômes ont disparu, d'autres persistent ». 

Venue pour un contrôle, elle a assisté à la séance de sensibilisation au cours de laquelle l'infirmière a expliqué que « les symptômes disparaîtront selon l'organisme de chacun ».

Des séquelles psychologiques

Les centres de santé sont parfois débordés par des personnes inquiètes prenant la moindre grippe pour un début de COVID. Cynthia Aholou, infirmière dans un centre de santé communautaire, soutient que certains cas sont vraiment sérieux et sont référés vers des hôpitaux équipés. Mais pour d'autres, c'est simplement la peur d'être à nouveau contaminé. 

Âgée de la soixantaine, Eugénie a accompagné son époux à la vaccination au centre national hospitalier et universitaire de Cotonou. Sur place, elle s'est plainte d'avoir souvent la bouche sèche, des douleurs inexpliquées lorsqu'elle mange, la nausée de façon répétée, et une intolérance subite à la consommation de certains aliments qu'elle aimait pourtant auparavant.

De petits symptômes qu'elle traîne depuis quelques semaines. En raison de son âge, l'agent de santé lui a proposé quelques analyses pour écarter toutrisques, surtout qu'Eugenie a déjà souffert de la COVID. Ce sont peut-être les signes prolongés du virus. Eugénie en est d'ailleurs persuadée. « Je croyais qu'on en avait terminé avec cette histoire. Mais elle s'éternise. J'ai bien peur qu'elle fasse désormais partie de nos vies comme le paludisme, la grippe et autres infections », murmure-t-elle. « Je connais des gens qui ont été guéris après deux ou trois semaines, mais j'ai l'impression que chez les personnes d'un certain âge comme moi, c'est difficile. Peut-être que mon diabète et mes problèmes cardiaques y sont pour quelque chose », s'interroge la dame.

Pourtant, les patients qui se bousculent dans les centres de santé ne sont pas tous de so âge. Florent est un conducteur de taxi-moto âgé de la trentaine. Il s'est présenté à l'hôpital parce qu'il souffrait depuis un mois de fatigue excessive, de bourdonnements dans les oreilles et de douleurs abdominales. Il pensait qu'il s'agissait des aléas de son métier, d'autant plus qu'il avait déjà reçu une dose de vaccin contre le coronavirus. Mais un test lui révélera quelques jours plus tard qu'il avait le COVID. « Nous sommes nombreux à ne pas avoir la vraie information. C'est à l'hôpital que j'ai appris que les symptômes prolongés du COVID peuvent différer d'une personne à une autre. Ce que nous prenons pour une infection banale ou un cas de paludisme peut être plus sérieux. Je suis toujours venu dans ce centre de santé sans jamais faire attention à ces affiches qui parlent de COVID long ».

Les médecins spécialistes sont les plus débordés actuellement. Des irritations cutanées aux problèmes oculaires en passant par les douleurs articulaires et les problèmes respiratoires thoraciques, les plaintes sont diverses. Selon le psychologue Raoul Satondji, beaucoup se plaignent d'anxiété : « Je pense qu'il y a beaucoup de stress, de panique. Lorsque vous souffrez d'un mal qui prend du temps à disparaître, votre moral en prend forcément un coup. C'est ce qui arrive chez les patients que je reçois. »

La vaccination, seule arme véritable pour prévenir le COVID long

Heureusement, le gouvernement, à travers le ministère de la santé, a mis en place des stratégies pour continuer à accompagner les populations. Il s'agit d'accompagner ceux qui traversent cette phase de COVID long mais également de continuer la sensibilisation. En annonçant la levée des mesures restrictives il y a un an, le ministre de la Santé, Benjamin Hounkpatin, avait mis l'accent sur la prévention et la vaccination : « Nous levons certaines des mesures restrictives pour permettre un retour à la vie normale, mais nous demeurons en état d'alerte maximale parce que la pandémie continue de roder », avait-il déclaré. « Nous avons encore quelques cas, mais nous sommes sortis des situations où il y avait une flambée des cas graves », a-t-il ajouté.

Pour le Docteur Ange Dodji Dossou, directeur national de la médecine hospitalière, se faire vacciner est très important : « Aujourd'hui, la vaccination est la seule arme véritable que nous avons et il faudrait que les Béninois en prennent conscience ». Il demande aussi aux personnes ayant souffert de la COVID de prendre le temps de récupérer complètement : « Sortir de l'hôpital après quelques semaines de traitement n'est pas suffisant. Il faut pouvoir se donner le temps de récupérer complètement. Cela veut dire physiquement et psychologiquement. C'est très important », a-t-il ajouté.

Être vacciné contre la COVID-19 réduit de moitié le risque de développer le COVID long, selon une vaste étude publiée dans JAMA Internal Medicine. Les facteurs de risque incluent le surpoids, le fait d'être de sexe féminin, le tabagisme et être âgé de plus de 40 ans. Les comorbidités telles que l'asthme, la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), le diabète de type 2, les maladies coronariennes, l'immunosuppression, l'anxiété et la dépression sont également associées à un risque accru. En revanche, la vaccination offre une protection significative, réduisant presque de moitié le risque de symptômes prolongés.

En guise de soutien aux actions du gouvernement dans la gestion du COVID long, le Conseil national de lutte contre le VIH/Sida, la tuberculose et le paludisme (CNLS-TP) et Plan International Bénin ont appelé au maintien des gestes barrières et à la mobilisation autour de la vaccination contre le COVID-19. Avant ces deux organisations, c'est l'USAID et l'UNICEF qui ont réuni les influenceurs et les artistes afin qu'ils aident à mobiliser les communautés autour de la vaccination. La couverture vaccinale est actuellement de 34,71% avec plus de 2 917 305 personnes complètement vaccinées.