Norovirus : bientôt un vaccin pour éviter la gastro ?

Un vaccin oral montre des premiers signes prometteurs pour prévenir l’infection et limiter la transmission du norovirus.

  • 6 juin 2025
  • 5 min de lecture
  • par Linda Geddes
Illustration du norovirus. Crédit : CDC
Illustration du norovirus. Crédit : CDC
 

 

Dans une nouvelle étude, des chercheurs ont montré qu’un vaccin oral expérimental déclenche la production d’anticorps capables de neutraliser un large éventail de souches de norovirus.

Le vaccin pourrait également réduire la quantité de virus excrétée par les personnes infectées, ce qui laisse espérer qu’un vaccin à large spectre de protection pourrait bientôt voir le jour.

Le virus des vomissements

Le norovirus est un virus extrêmement contagieux qui se transmet par des aliments ou de l’eau contaminés, par les surfaces souillées ou par contact direct avec une personne infectée – y compris par des particules en suspension dans l’air provenant de vomissements ou de diarrhées.

Également surnommé « virus des vomissements hivernaux » en raison de sa plus grande fréquence pendant les mois froids dans de nombreuses régions du monde, il constitue l’une des principales causes de gastro-entérite aiguë (inflammation de l’estomac et des intestins) à l’échelle mondiale.

Si la plupart des personnes touchées s’en remettent, le virus représente une menace sérieuse pour les jeunes enfants, les personnes âgées et les personnes immunodéprimées. On estime qu’il est responsable d’environ 200 000 décès par an, dont 70 000 chez des enfants vivant dans des pays à revenu faible ou intermédiaire.

« Les cas de norovirus ont doublé cet hiver par rapport aux deux années précédentes, ce qui souligne à quel point ce virus est à la fois répandu et en constante évolution. Il est urgent de disposer d’un vaccin pour réduire le fardeau mondial des maladies liées au norovirus », explique la Dre Juyeon Park, autrice principale de l’étude et chercheuse postdoctorale à l’université du Texas, à Austin (États-Unis).

Un vaccin contre le norovirus

Mettre au point un vaccin contre le norovirus s’est avéré particulièrement difficile, car le virus est un maître du camouflage : il mute fréquemment pour échapper au système immunitaire, avec une grande diversité de variantes génétiques.

Plusieurs candidats vaccins sont néanmoins en cours de développement clinique, dont un vaccin à ARN messager (ARNm), plusieurs vaccins à base de pseudo-particules virales, ainsi qu’un vaccin oral utilisant un adénovirus affaibli et modifié pour livrer une protéine du norovirus – appelée VP1 – aux cellules humaines.

C’est cette dernière stratégie – un vaccin dit « à vecteur viral » – qui a fait l’objet du présent essai clinique.

La Dre Park et ses collègues ont testé un vaccin oral expérimental contre le norovirus, développé par l’entreprise Vaxart et baptisé VXA-G1.1-NN. Ils ont voulu déterminer si ce vaccin pouvait déclencher des anticorps protecteurs contre le virus et/ou prévenir l’infection, en administrant le vaccin ou un placebo à 165 volontaires, dont certains ont ensuite été volontairement exposés au norovirus.

Ils ont découvert que le vaccin ne se contentait pas de préparer le système immunitaire à combattre l’infection en déclenchant la production d’anticorps contre la protéine VP1, à la fois dans le sang et dans la muqueuse intestinale : il réduisait également la quantité de virus excrétée par les personnes infectées, dans leurs selles comme dans leurs vomissements – un élément clé pour limiter la transmission.

Point faible du virus

Une analyse moléculaire poussée a par ailleurs révélé que certaines personnes produisaient des anticorps capables de neutraliser plusieurs souches de norovirus, y compris celles responsables d’environ 75 % des épidémies mondiales.

« Ces résultats offrent des éléments cruciaux sur la façon dont le système immunitaire réagit au norovirus et ouvrent la voie à la conception d’un vaccin offrant une protection large et durable », a déclaré le professeur George Georgiou, co-auteur de l’étude, également basé à l’université du Texas à Austin. « Nous avons identifié des anticorps très larges dans leur capacité à neutraliser de nombreuses variantes du virus, passées ou actuelles. »

Ces anticorps pourraient également servir de base à une thérapie post-infection destinée aux personnes immunodéprimées, qui ne peuvent pas éliminer le virus par elles-mêmes, a ajouté le Pr Georgiou.

L’un des anticorps les plus prometteurs identifiés par l’équipe, baptisé VX22, cible un point faible jusque-là inconnu dans la structure du virus – un point commun à plusieurs souches – ce qui en fait un excellent candidat pour le développement de vaccins.

Moins d’infections

Les résultats, publiés dans la revue Science Translational Medicine, montrent que parmi les 71 participants ayant reçu le vaccin expérimental puis été volontairement exposés au norovirus, 57,1 % ont été infectés, contre 81,5 % dans le groupe placebo – soit une réduction relative du risque d’infection de 30 %.

Cependant, les chercheurs précisent que la quantité de virus utilisée lors de l’exposition était bien plus élevée que celle rencontrée dans des conditions réelles, et que la souche virale utilisée ne correspondait pas à celle qui circule le plus à l’échelle mondiale. Il reste donc incertain dans quelle mesure ces résultats se traduisent en protection effective dans la vie courante.

Le vaccin ne se contente pas de réduire les infections : il diminue aussi la quantité de virus présente dans les selles jusqu’à une semaine après l’exposition, même chez les personnes qui ne tombent pas malades. Il limite également la fréquence des vomissements et la charge virale contenue dans ces vomissements, ce qui pourrait réduire deux voies majeures de transmission.

« Le vomissement est une voie de transmission clé, comme l’indiquent des études épidémiologiques montrant que le risque de contracter le norovirus augmente avec le nombre d’épisodes de vomissement et la proximité avec ces événements », écrivent les chercheurs. « Nous émettons l’hypothèse que la vaccination agit sur la transmission en réduisant la quantité de virus libérée dans l’environnement via les objets contaminés et les gouttelettes en suspension dans l’air. »

« Cette découverte nous rapproche d’un vaccin capable d’offrir une protection durable et de prévenir les effets dévastateurs des épidémies de norovirus, ainsi que d’un traitement potentiel pour les personnes déjà infectées », a conclu le Pr Georgiou.

L’équipe travaille désormais à améliorer la formulation du vaccin et à le tester sur un éventail plus large de populations, notamment les personnes âgées et les jeunes enfants.