Rougeole et grossesse : 5 choses que les médecins veulent absolument que vous sachiez

Des experts canadiens de la rougeole alertent sur les risques graves que fait peser la hausse des cas de cette maladie extrêmement contagieuse sur les femmes enceintes et les nouveau-nés.

  • 25 juillet 2025
  • 4 min de lecture
  • par Linda Geddes
Un professionnel de santé place un pansement sur le site d'injection d'une patiente enceinte. Crédit : CDC
Un professionnel de santé place un pansement sur le site d'injection d'une patiente enceinte. Crédit : CDC
 

 

Des médecins confrontés directement aux flambées de rougeole au Canada ont publié un article qui résume les informations essentielles à connaître pour les femmes enceintes et leurs médecins : comment reconnaître la maladie et, surtout, comment s’en protéger.

Cette prise de parole intervient alors que le pays vient de connaître son premier décès lié à la rougeole cette année : un nourrisson contaminé avant la naissance par sa mère, qui n’était pas vaccinée. Depuis la fin de l’année dernière, six autres bébés nés de mères non vaccinées ont également été atteints par la rougeole dans la province de l’Ontario, selon le médecin hygiéniste en chef de la province.

Le retour de la rougeole

Comme dans de nombreux pays, le nombre de cas de rougeole est en forte hausse au Canada, avec plus d’infections enregistrées au cours des deux premiers mois de 2025 que pendant toute l’année 2024. L’Ontario est au cœur de cette nouvelle vague, avec plus de 2 000 cas signalés depuis octobre. Cette résurgence est largement attribuée à la baisse de la couverture vaccinale.

Dans un article publié dans le Journal de l’Association médicale canadienne, les médecins insistent sur le fait que la meilleure façon de prévenir les complications liées à la rougeole pendant la grossesse et chez les nouveau-nés consiste à s’assurer que toutes les personnes en âge de procréer sont à jour dans leur vaccination.

« Contracter le virus de la rougeole pendant la grossesse peut avoir des conséquences graves et durables, à la fois pour le parent qui accouche et pour l’enfant à naître », explique la Dre Michelle Barton, pédiatre à l’Hôpital pour enfants du London Health Sciences Centre, en Ontario. « Cela peut être très sérieux : certains bébés développent des complications dès la naissance, d’autres plusieurs années plus tard. Nous espérons que cet article aidera à mieux faire connaître les risques. »

Voici les cinq points essentiels que ces médecins souhaitent porter à la connaissance du public sur les dangers que représente la rougeole pour les personnes enceintes et leurs bébés.

1. La rougeole est plus dangereuse pendant la grossesse – et peut être mortelle

La rougeole n’est pas une maladie réservée à l’enfance. Attraper la rougeole en étant enceinte augmente considérablement les risques : pneumonie, hépatite, hospitalisation, voire décès. Le risque de mourir est multiplié par dix par rapport aux personnes non enceintes. La maladie augmente aussi les probabilités de fausse couche, d’accouchement prématuré et de retard de croissance chez le fœtus.

2. Un traitement existe – mais il faut agir vite

Les personnes exposées à la rougeole peuvent recevoir un traitement par immunoglobulines intraveineuses, une solution concentrée d’anticorps prélevés chez des donneurs en bonne santé. Ce traitement permet de réduire le risque d’infection ou d’en atténuer la gravité – mais il doit être administré dans les six jours suivant l’exposition. Il est aussi recommandé pour les personnes ayant reçu une seule dose du vaccin ROR (rougeole-oreillons-rubéole) ou dont le statut vaccinal est incertain. « Un travail prématuré doit être considéré comme un signe potentiel d’infection chez les personnes enceintes exposées et vulnérables », soulignent la Dre Barton et ses collègues.

3. À l’hôpital, des précautions strictes sont nécessaires

La rougeole est l’un des virus les plus contagieux au monde : une personne infectée peut en contaminer jusqu’à 18 autres. Le virus se transmet par voie aérienne. Ainsi, si une personne enceinte est hospitalisée, il est crucial de mettre en place des mesures rigoureuses de prévention des infections – pour protéger tout le monde. Les spécialistes des maladies infectieuses doivent être impliqués dès qu’une personne enceinte ou son bébé est touché·e, et les protocoles doivent être scrupuleusement respectés tout au long de la période de contagiosité.

4. Attraper la rougeole juste avant d’accoucher peut gravement nuire au bébé

La rougeole congénitale se produit lorsque le bébé est infecté avant la naissance. Les symptômes apparaissent généralement dans les dix premiers jours de vie : fièvre, éruption cutanée, hépatite (inflammation du foie), pneumonie. Dans certains cas, des complications graves surviennent, dont une maladie cérébrale rare, progressive et presque toujours mortelle : la panencéphalite subaiguë sclérosante. Le risque est particulièrement élevé si la mère contracte la rougeole dans les deux semaines précédant l’accouchement.

5. La prévention est simple : vérifiez votre statut vaccinal

C’est le message principal des médecins : toute personne en âge de procréer devrait vérifier si elle est à jour dans sa vaccination contre la rougeole, et recevoir une dose de rappel si nécessaire.

« Les personnes enceintes n’ont pas les mêmes possibilités de se protéger contre l’infection que celles qui ne le sont pas, car les vaccins contenant le virus de la rougeole sont en général contre-indiqués pendant la grossesse en raison d’un risque théorique pour le fœtus », explique la Dre Catherine Varner, rédactrice en chef adjointe du Journal de l’Association médicale canadienne (CMAJ) et médecin en médecine d’urgence, dans un éditorial accompagnant l’article. « Ainsi, les personnes enceintes non vaccinées, ou n’ayant reçu qu’une seule dose de vaccin contre la rougeole, sont particulièrement vulnérables lors des flambées épidémiques. »

Pour réduire ce risque, « les médecins devraient systématiquement demander aux patientes qui envisagent une grossesse si elles ont bien reçu deux doses de vaccin contre la rougeole ».

Elle ajoute : « Les personnes enceintes sont souvent plus exposées que le reste de la population lors des épidémies de maladies infectieuses. Elles ne peuvent donc pas être traitées comme une simple variable d’ajustement dans les stratégies de prévention et les réponses des systèmes de santé. »