Les cyclones tropicaux provoquent une recrudescence du paludisme à Madagascar

De nouvelles recherches soulignent la nécessité de renforcer la lutte contre le paludisme dans les régions vulnérables au changement climatique.

  • 21 juillet 2025
  • 3 min de lecture
  • par Linda Geddes
Image satellite du cyclone tropical très intense Freddy, le 19 février 2023. Crédit : NASA/Suomi-NPP.
Image satellite du cyclone tropical très intense Freddy, le 19 février 2023. Crédit : NASA/Suomi-NPP.
 

 

Alors que le changement climatique engendre des phénomènes météorologiques de plus en plus extrêmes, de nouvelles recherches révèlent que les cyclones tropicaux peuvent entraîner des pics de cas de paludisme, risquant de compromettre les efforts de lutte contre la maladie dans des pays vulnérables comme Madagascar.

Située au large de la côte sud-est de l’Afrique, Madagascar est souvent la première grande masse terrestre touchée par les cyclones tropicaux qui se forment au-dessus des eaux chaudes de l’océan Indien. Ces derniers mois, le pays a été frappé par une série de tempêtes intenses, dont trois cyclones successifs qui ont provoqué des pluies torrentielles, inondé des bâtiments et endommagé les infrastructures de santé.

« Ces tempêtes ont provoqué à plusieurs reprises des urgences humanitaires ces dernières années, entraînant destructions massives, déplacements de population et dommages aux infrastructures de santé », expliquent le Dr Benjamin Rice, de l’université de Princeton (New Jersey, États-Unis), et ses collègues, auteurs de cette nouvelle étude.

« En particulier, les cyclones Batsirai et Freddy ont détruit plus de 300 établissements de santé et entraîné des besoins d’aide humanitaire immédiate pour environ 112 115 personnes en 2022 et 290 000 personnes en 2023. »

Zones à risque cyclonique

Au-delà des dommages causés aux infrastructures de santé dans leur ensemble, les cyclones entravent également l’accès à la prévention et au traitement du paludisme. Or, alors que ces phénomènes extrêmes devraient devenir plus fréquents avec le changement climatique, comprendre leur impact sur la lutte antipaludique devient crucial — en particulier dans les pays à forte prévalence comme Madagascar — mais les données disponibles restent rares.

Pour mieux cerner ce lien, Benjamin Rice et ses collègues ont analysé les données d’une étude menée auprès de 500 foyers dans le district de Mananjary, situé sur la côte sud-est de Madagascar. Entre juillet 2021 et avril 2023, les membres de ces foyers ont été testés de manière répétée pour le paludisme — avant et après les cyclones Batsirai et Freddy — permettant ainsi aux chercheurs d’évaluer la résilience des interventions antipaludiques face à ces événements. Les personnes infectées ont reçu un traitement.

L’étude, publiée dans la revue Science, révèle que les cyclones tropicaux provoquent une forte augmentation des infections et réinfections paludiques — notamment chez les enfants : dans les zones à forte transmission, jusqu’à la moitié des enfants d’âge scolaire et plus d’un tiers des plus jeunes ont été infectés dans les deux mois suivant les cyclones Batsirai et Freddy.

Forts de ces données, les chercheurs ont également modélisé différents scénarios pour estimer les effets d’un renforcement ou, au contraire, d’une perturbation des efforts de prévention — comme le dépistage ou l’administration de traitements antipaludiques — pendant les saisons cycloniques.

« Nous constatons que le risque d’infection (et de réinfection) par le paludisme est suffisamment élevé après les cyclones tropicaux à Madagascar pour que les perturbations des activités de santé publique qui accompagnent ces événements représentent une menace sérieuse pour les progrès de la lutte contre la maladie », concluent les auteurs.

Quel rôle pour les vaccins ?

Bien que Madagascar n’ait pas encore intégré les vaccins antipaludiques à son programme de vaccination de routine, les chercheurs ont également évalué l’impact potentiel de la vaccination pour atténuer les périodes de vulnérabilité induites par les cyclones. Ils ont constaté que la vaccination pourrait entraîner une réduction substantielle — d’environ 50 % — de la fréquence du paludisme symptomatique dans les semaines suivant ces catastrophes. Ils ont toutefois précisé que les vaccins, à eux seuls, ne suffiraient probablement pas à faire baisser significativement la transmission.

Les auteurs insistent également sur le fait que l’introduction de vaccins ne doit pas détourner l’attention ni les ressources d’autres interventions essentielles : distribution de moustiquaires en période de déplacement de population, renforcement des structures de santé pour mieux résister aux tempêtes, ou encore mise en place de stratégies de prophylaxie adaptées aux perturbations météorologiques extrêmes.