Grippe aviaire : des experts appellent à se préparer à une possible pandémie
Des virologues de 40 pays tirent la sonnette d’alarme : face à des failles persistantes dans la préparation mondiale aux pandémies, ils appellent les gouvernements à agir dès maintenant pour éviter une nouvelle crise sanitaire majeure.
- 16 mai 2025
- 4 min de lecture
- par Priya Joi

Des virologues de renom issus de plus de 40 pays lancent un avertissement urgent face au risque grandissant d’une pandémie de grippe aviaire H5N1. Ils appellent les dirigeants mondiaux à renforcer immédiatement les défenses contre un virus qui peut tuer une personne sur deux parmi les individus infectés.
Depuis deux ans, le virus a évolué : alors qu’il circulait principalement chez les oiseaux, il devient de plus en plus apte à infecter des mammifères comme les porcs ou les bovins. Bien qu’un petit nombre de cas humains ait été recensé, le virus ne s’est pas encore transmis d’homme à homme — mais cela pourrait changer.
Dans un rapport publié dans The Lancet Regional Health – Americas, le Global Virus Network (GVN), un consortium réunissant certains des meilleurs virologues mondiaux, affirme que sans action urgente pour améliorer la surveillance, la biosécurité, la préparation à une éventuelle transmission interhumaine, et la protection des populations via la vaccination et d’autres mesures préventives, nous pourrions être confrontés à une catastrophe sanitaire mondiale.
Un virus en évolution
Les virus grippaux sont particulièrement efficaces pour franchir les barrières entre espèces — c’est la raison pour laquelle la plupart des pandémies historiques ont été des pandémies de grippe. La capacité croissante du H5N1 à infecter les mammifères pourrait être une étape inquiétante vers une transmission plus aisée à l’être humain.
Les scientifiques s’inquiètent également du risque de co-infection entre la grippe aviaire et la grippe saisonnière, notamment après un hiver particulièrement rude dans l’hémisphère nord. Si le virus H5N1 devait acquérir des mutations lui permettant de se transmettre comme la grippe saisonnière, les conséquences pourraient être dramatiques.
Des failles préoccupantes
Lors de la pandémie de COVID-19, le monde n’était pas préparé. Depuis, dirigeants et experts de la santé ont promis de mieux anticiper la prochaine crise sanitaire. Pourtant, les scientifiques du GVN estiment que la surveillance aux interfaces entre animaux et humains reste très insuffisante, ce qui pourrait retarder la détection d’un virus capable de franchir plus souvent la barrière des espèces.
Ils dénoncent également « l’absence de mécanisme clair pour activer des mesures de réponse », soulignant qu’un signal d’alerte, même détecté à temps, ne se traduirait pas forcément par une réaction rapide et à la hauteur du danger.
Pour aller plus loin
Se préparer au pire
Les scientifiques proposent un plan d’action en dix points qu’ils appellent les dirigeants du monde entier à mettre en œuvre dès maintenant, afin de limiter les dégâts si la grippe aviaire devait effectivement devenir une pandémie.
Parmi les priorités figurent un partage plus rapide des données génomiques pour suivre les mutations du virus en temps réel, et des investissements dans des systèmes capables d’exploiter ces données pour prédire les caractéristiques visibles du virus.
Ce partage de données génétiques est également crucial pour le développement de vaccins — autre élément clé du plan. Les experts soulignent la nécessité de mieux comprendre dans quelle mesure les vaccins déjà stockés pourraient offrir une protection, en particulier au début d’une pandémie, lorsque les vaccins parfaitement adaptés ne sont pas encore disponibles.
Au-delà du renforcement des systèmes de santé publique, le plan appelle à une meilleure biosécurité et à des mesures de confinement dans les exploitations agricoles, les contacts entre animaux d’élevage et humains ayant déjà provoqué plusieurs cas de transmission.
Enfin, les virologues demandent la mise en place de plans concrets pour le déploiement des tests, vaccins et traitements : cela inclut une évaluation des stocks nationaux existants et la planification de la distribution des nouveaux vaccins. L’idéal serait que les tests puissent être réalisés directement dans les cliniques locales, pour une réponse rapide, mais avec un système de collecte centralisé des données afin d’en assurer le suivi.
Ils recommandent aussi de préparer en amont des protocoles pour lancer rapidement des essais cliniques sur toute nouvelle souche pandémique.
Les auteurs concluent en soulignant que la collaboration internationale sera essentielle. « L’épidémie actuelle en Amérique du Nord [chez les vaches laitières] est en grande partie bénigne, écrivent-ils, mais les taux de mortalité historiques de 50 % chez l’humain avec le H5N1 montrent les conséquences dramatiques d’une réaction insuffisante. »
Davantage de Priya Joi
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