On a parlé vaccins avec… Urbain Gozim, leader communautaire pygmée dans le nord du Congo

Cet été, VaccinesWork publie une série d'entretiens sur les vaccins et les maladies infectieuses avec des leaders communautaires, travailleurs de santé, experts et personnalités, pour montrer la diversité des talents et bonnes volontés dont on a besoin pour améliorer la santé des populations. Dans cet entretien, Jean David Mihamle a interrogé Urbain Gozim, leader autochtone dans le nord du Congo.

  • 19 juillet 2022
  • 3 min de lecture
Urbain Gozim, leader autochtone pygmée. Crédit : Urbain Gozim
Urbain Gozim, leader autochtone pygmée. Crédit : Urbain Gozim
 

 

Professeur d'enseignement général issu de l'université Marien Gouabi de Brazzaville, Urbain Gozim est un leader écouté et respecté au sein de sa communauté : les pygmées. Il utilise régulièrement sa position pour défendre les intérêts des siens, notamment dans l'exploitation forestière de sa région, Sembe, dans le département de la Sangha dans le nord du Congo. Il encourage aussi sa communauté, parmi l'une des plus marginalisées du pays, à adhérer à la vaccination.

Comment est-ce que les peuples autochtones dans la Sangha perçoivent-ils la vaccination ?

La vaccination est un droit pour tout le monde. Si les peuples comme les Bantous en profitent, les autres comme les peuples autochtones doivent aussi en profiter !

Y a-t-il des réticences, ou au contraire, les vaccins sont aisément acceptés parmi les pygmées ?

D’une manière générale la vaccination est bien acceptée au sein de notre peuple. On connait la vaccination contre la tuberculose, le BCG, la rougeole, etc. Cependant, ces dernières années, on a vu que beaucoup de personnes hésitaient avec le vaccin contre la COVID-19. L'acceptation n'était pas comme avec les anciens vaccins. Quelques-uns se sont vaccinés. Mais beaucoup ont refusé. Sûrement parce que c'est nouveau. Il faut du temps pour s'habituer et comprendre.

« La vaccination est un droit pour tout le monde. »

Personnellement, est-ce que vous avez été vacciné contre la COVID-19 ?

Absolument ! Je me suis fait vacciner. En tant que leader, je me devais de montrer l'exemple. Il n'y a pas de problème, je me sens bien. Donc ça va et cela rassure notre peuple de voir mon implication.

Comment faites-vous pour promouvoir la vaccination au sein de votre peuple autochtone ?

Je suis un facilitateur pour la vaccination, je suis ce qu'on appelle un relai communautaire au sein des peuples autochtones. Lorsque la communauté voit l'un des leurs, quelqu'un qui leur ressemble, elle se sent en confiance. Elle est rassurée. Moi, je sensibilise et mobilise les membres de ma communauté. Les vaccins sont faits pour sauver des vies. Les Bantous font de même pour leur communauté dans la sensibilisation.

Urbain Gozim, leader autochtone (2e en partant de la gauche). Crédit : Urbain Gozim
Urbain Gozim, leader autochtone (2e en partant de la gauche).
Crédit : Urbain Gozim

Quelle est votre zone d'intervention ?

J'interviens ici à Sembe. Je travaille aussi sur l'axe Sembe-Souanke (dans le nord du Congo, en allant vers le sud-est du Cameroun, ndlr). Je vais aussi dans les campements en forêt. Lorsque je vais dans le massif forestier Messok-Dja, dans un autre cadre, j'en profite aussi pour sensibiliser sur les bienfaits des vaccins.

Quels sont les problèmes que vous rencontrez dans la sensibilisation pour la vaccination ?

Nous sommes confrontés aux problèmes de moyens de transport. Il nous faut des motos pour atteindre facilement des zones reculées en forêt. Pour la chaîne du froid, nous utilisons régulièrement des chambres froides où l'on stocke des produits alimentaires. Les sœurs de la congrégation des franciscains nous aident aussi à conserver les vaccins. Sinon en soirée, nous sommes obligés de faire deux heures de route pour aller garder les vaccins à Ouesso, qui dispose des équipements appropriés.

Avez-vous un dernier mot à l'endroit des peuples autochtones ?

Je leur dirai que la vaccination est un droit. Il faut en profiter. Ils sauvent la vie ! Je vous l'ai dit : je suis vacciné. Je n'ai pas de problème. Je mène normalement mes activités comme surveillant général au CEG (Collège d'enseignement Général, ndlr) de Sembe.

Propos recueillis par téléphone par Jean David Mihamle à Pointe-Noire.