Pour améliorer l’accès à la vaccination, faisons reculer les inégalités femmes – hommes

Antoinette Sassou-N’Guesso, Première Dame de la République du Congo, Présidente de l'Organisation des Premières Dames d'Afrique pour le Développement (OPDAD), livre ses réflexions quant à l'importance de toujours garder les droits des femmes en ligne de mire pour améliorer la santé en Afrique.

  • 19 avril 2022
  • 5 min de lecture
  • par Antoinette Sassou-N’Guesso
S.E. Madame Antoinette Tchibota Sassou-Nguesso, Première Dame de la République du Congo, Présidente de l'Organisation des Premières Dames d'Afrique pour le Développement (crédit : OPDAD)
S.E. Madame Antoinette Tchibota Sassou-Nguesso, Première Dame de la République du Congo, Présidente de l'Organisation des Premières Dames d'Afrique pour le Développement (crédit : OPDAD)
 

 

Durant tout le mois de mars 2022, nous avons célébré le mois des femmes. Pour l’institution que je préside, l'Organisation des Premières Dames d'Afrique pour le Développement (OPDAD), ce fut l’opportunité pour rendre une nouvelle fois hommage à toutes celles qui ont été en première ligne, ces deux dernières années, contre la pandémie de coronavirus : de Brazzaville à Harare, de Dakar à Addis-Abeba, scientifiques, soignantes, coordinatrices, mères et filles qui nous ont protégé et qui ont durement été affectées par la Covid-19.

Il faut identifier et éliminer les différents obstacles qui ont un impact négatif sur l’immunisation des enfants zéro-dose ou sous-vaccinés, qui représentent jusqu’à 2 enfants sur 10 dans les pays soutenus par Gavi.

Bien sûr, ce n’est pas parce que le mois de mars est arrivé à son terme, qu’il faut éliminer les problématiques de genre de nos réflexions et de nos actions, surtout lorsqu’il s’agit de santé. L’arrivée prochaine de la semaine africaine de la vaccination, en concomitance de la semaine mondiale de la vaccination qui aura lieu fin avril, nous offre une nouvelle occasion d’affirmer que tout le monde, chaque enfant, chaque femme, a le droit d’être protégé contre les maladies évitables grâce aux vaccins : pour vivre, comme l’exprime le thème de cette semaine de sensibilisation, une longue vie, en bonne santé.

L'autonomisation des femmes et des filles pour une meilleure santé

La pandémie qui frappe le monde depuis maintenant deux ans nous l’a rappelé : genre et santé interagissent de manière évidente.

Nous, les Premières Dames d’Afrique, sommes très bien placées pour le savoir, et depuis longtemps : en 20 ans d’existence, notre organisation a été témoin des ravages que d’autres épidémies, bien avant la COVID-19, ont infligé aux femmes et aux filles d’Afrique. C’est le cas du VIH/Sida, qui continue, malheureusement, de coûter des vies sur notre continent, surtout celles des femmes. Les jeunes femmes âgées de 15 à 22 ans représentent jusqu’à 66% des nouvelles contaminations dans certaines régions. Cette disparité entraîne des conséquences terribles sur les générations futures, puisque plus de la moitié des enfants qui naissent de mères portant le virus, l’auront eux-mêmes.

Gavi/2021/Christophe Da Silva
Gavi/2021/Christophe Da Silva

En ce qui concerne la protection contre les maladies infectieuses, on comprend également mieux les inégalités qui existent quand on prend en compte le facteur clé que constitue le genre. C’est une analyse que nous partageons avec nos partenaires internationaux, dont Gavi, l’Alliance du vaccin. Aller vers l'autonomisation des femmes et des filles n’est pas juste une question de santé : c’est le 5ème objectif de développement durable, qui nous tient particulièrement à cœur.

Comme le montre l’Indice de développement de genre de l’Organisation des Nations Unies, la couverture vaccinale est meilleure dans les pays plus égalitaires. Le sexisme peut réduire les chances des enfants d’être vaccinés, en empêchant l’accès des parents aux services de vaccination. Pour que tous les enfants, garçons et filles, aient accès aux vaccins qui les protègeront contre les maladies graves telles que la rougeole, la poliomyélite ou le choléra, nous devons impérativement œuvrer pour l’égalité des genres.

Atteindre les enfants zéro-dose et sous-vaccinés

Pour cela, il faut identifier et éliminer les différents obstacles qui ont un impact négatif sur l’immunisation des enfants zéro-dose ou sous-vaccinés, qui représentent jusqu’à 2 enfants sur 10 dans les pays soutenus par Gavi. Ces obstacles sont nombreux : le manque d’accès des femmes aux ressources financières du ménage, qui peut limiter les moyens de payer les coûts indirects de la vaccination, le manque d’éducation des mères, l’inégale répartition des tâches dans la famille qui détourne le père des soins donnés aux enfants, notamment de la vaccination, les problèmes de sécurité et de mobilité qui peuvent décourager les femmes, surtout celles avec de jeunes enfants, à se déplacer vers les infrastructures de santé.

C’est un travail de longue haleine, qui concerne l’ensemble de la société.

Gavi/2021/Christophe Da Silva
Gavi/2021/Christophe Da Silva

Soutien au vaccin contre le VPH

Nous saluons le soutien que Gavi apporte à un vaccin qui protège plus particulièrement la santé des femmes et des jeunes filles : le vaccin contre le virus du papillome humain (VPH). Le VPH est la principale cause de cancer du col de l’utérus. L’Afrique est extrêmement touchée par ce fléau, puisque plus de 85% des décès par cancer du col surviennent dans les pays en développement où, très souvent, les femmes n’ont pas accès au dépistage ni au traitement.

Le vaccin, à administrer avant une exposition au virus, peut potentiellement réduire de 90% les cas de cancer du col utérin. Mais pour y arriver, nous devons vacciner nos filles, faire de ce vaccin une priorité, et plus généralement mettre des ressources suffisantes dans la santé des filles et des femmes.

Vaccinons nos filles contre le VPH, et aussi nos fils : car ils peuvent être porteurs du virus et le transmettre sans le savoir, et peuvent, eux aussi, développer des cancers dus au papillomavirus. L’efficacité et la sécurité de ce vaccin ont été démontrées autant chez les hommes que chez les femmes.

L’égalité femmes – hommes, l’affaire de tous

Nous l’aurons compris : nous devons toutes et tous être mobilisés pour améliorer les conditions de santé des femmes et des filles sur notre continent. Chers hommes qui lisez ce billet, vous avez toute votre place dans ce combat : c’est avec vous que nous le gagnerons. Nous le devons aux générations futures. Personne ne doit être laissé de côté.

Joignons nos forces pour faire tomber les obstacles à l’accès à la vaccination, pour faire de l’Afrique un continent avec des enfants, jeunes et femmes en bonne santé et autonomes. C’est la raison d’être de l’OPDAD, et nous, les Premières Dames d'Afrique, grâce à notre position et notre expertise uniques, continueront de favoriser une prise de conscience dans les domaines du genre et de la santé, avec le soutien précieux de Gavi et de nos autres partenaires.