Introduction de vaccin contre le VPH au Mali : une nouvelle arme pour protéger des générations de femmes maliennes

Dans une démarche historique, le gouvernement malien a intégré le vaccin contre le papillomavirus humain (VPH) dans son programme de vaccination de routine au début du mois de novembre. Lors d’une cérémonie organisée à Bamako, en présence de nombreux dignitaires et partenaires internationaux, Gavi et le ministère de la Santé et du Développement Social ont souligné l’importance de ce lancement, qui marque une avancée majeure dans la prévention du cancer du col de l’utérus chez les femmes maliennes.

  • 19 novembre 2024
  • 5 min de lecture
  • par Aliou Diallo
La ministre de la Santé, le Colonel Assa Badiallo Touré, inocule la première dose du vaccin anti-VPH au Mali. Crédit : Aliou Diallo e du vaccin anti-VPH au Mali. Crédit : Aliou Diallo
La ministre de la Santé, le Colonel Assa Badiallo Touré, inocule la première dose du vaccin anti-VPH au Mali. Crédit : Aliou Diallo e du vaccin anti-VPH au Mali. Crédit : Aliou Diallo
 

 

Le cancer du col de l’utérus reste un fléau tragique pour de nombreuses femmes maliennes. Fatoumata, une femme de 38 ans, en est une victime parmi tant d’autres.

« J'avais d'abord un fibrome, et j'ai pris du temps à le traiter. C'est quand j'ai commencé à avoir des saignements que j'ai fait l'opération. Après l'opération, j'ai commencé à avoir des pertes, des pertes sans couleur ni odeur, on aurait dit de l'eau. Suite à cela, je suis allée voir mon gynécologue. Le résultat a montré que j'avais un cancer du col de l'utérus. J'ai dépensé entre 5 et 6 millions de francs CFA pour le traitement. Rien que l'opération m’a coûté deux millions de francs CFA. »

Avec cette initiative, le Mali espère protéger plus de 320 000 jeunes filles chaque année, réduisant ainsi les cas de cancer du col de l’utérus de près de 90 %. Cela pourrait permettre de prévenir plus de 3 600 décès chaque année parmi les femmes maliennes.

Ce témoignage met en lumière les difficultés rencontrées par de nombreuses femmes face à un diagnostic tardif, ainsi qu’un traitement coûteux et souvent inaccessible au Mali, où l'accès aux soins de qualité demeure limité.

Le fardeau du cancer du col de l’utérus au Mali

Le cancer du col de l'utérus, causé par une infection persistante par certains types du papillomavirus humain (VPH), est un problème majeur de santé publique au Mali. Il est le deuxième cancer le plus fréquent chez les femmes maliennes âgées de 15 à 44 ans. Cette maladie, souvent détectée trop tard, continue de faire des ravages dans le pays, entraînant des milliers de décès chaque année.

En plus des obstacles médicaux, des tabous culturels empêchent souvent les femmes de parler ouvertement de leurs symptômes. Les croyances populaires, qui associent parfois ces maladies à des malédictions ou des sorts, retardent le diagnostic et aggravent les conséquences. « La maladie du col de l'utérus est parfois perçue comme un sort jeté par une coépouse, une belle-sœur ou un ancien compagnon », explique une militante pour la santé sexuelle et reproductive.

Une avancée majeure : l'introduction du vaccin contre le VPH

Dans un tournant historique, le gouvernement malien a récemment intégré le vaccin contre le VPH dans son programme de vaccination de routine. Lors du lancement de cette campagne à Bamako, le Dr Ibrahima Diarra, directeur du Centre National d’Immunisation du Mali, a souligné l’importance de cette avancée : « Une seule dose suffit pour protéger une fillette de 10 ans pendant plus de dix ans contre les virus responsables de 70 % des cancers du col de l’utérus. » Le vaccin est désormais gratuit pour les jeunes filles, grâce à l’appui de Gavi et du cofinancement de l’État malien.

Des jeunes filles lors du lancement de la vaccination contre le VPH au Mali. 
© UNICEF/UNI673856/Borra 

Avec cette initiative, le Mali espère protéger plus de 320 000 jeunes filles chaque année, réduisant ainsi les cas de cancer du col de l’utérus de près de 90 %. Cela pourrait permettre de prévenir plus de 3 600 décès chaque année parmi les femmes maliennes.

Un pas vers l'équité en santé

Ce programme de vaccination marque une avancée significative vers l'équité en matière de santé publique. Le cancer du col de l'utérus tue chaque jour des milliers de femmes, particulièrement dans les pays à faible revenu. En 2022, 348 000 décès ont été enregistrés dans le monde, dont 90 % dans ces pays. En introduisant le vaccin, le Mali fait un acte de justice en rendant la prévention accessible à toutes les filles, qu'elles vivent en ville ou en milieu rural.

Dr Diarra explique pourquoi le choix s'est porté sur les filles de 10 ans : « Nous avons choisi cette tranche d’âge car leur col est encore sain, bien avant le début des rapports sexuels, ce qui garantit une efficacité maximale du vaccin. » Cette approche est en accord avec la recommandation de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) de prioriser la vaccination des jeunes adolescentes âgées de 9 à 14 ans.

Le Mali se distingue comme l’une des premières nations sahéliennes et le premier pays soutenu par Gavi dans la catégorie des pays fragiles et touchés par des conflits à introduire le vaccin contre le VPH.

En prévenant le cancer du col de l’utérus, l’introduction du vaccin anti-VPH permet également de réduire les coûts liés aux traitements coûteux de la maladie. « Une seule dose coûte environ 150 000 FCFA dans les officines privées, mais grâce à l’appui de Gavi et au cofinancement de l’État malien, ce vaccin est désormais gratuit dans le cadre du programme de vaccination de routine », se réjouit Dr Diarra.

Le Mali se distingue comme l’une des premières nations sahéliennes et le premier pays soutenu par Gavi dans la catégorie des pays fragiles et touchés par des conflits à introduire le vaccin contre le VPH. Cette initiative révolutionnaire protège non seulement des générations de femmes maliennes, mais sert également d’exemple pour d’autres pays de la région. Il s’agit d’une avancée majeure qui s’inscrit dans les objectifs mondiaux de Gavi visant à vacciner 86 millions de jeunes filles dans les pays à revenu faible et intermédiaire d’ici 2025.

Lutte contre les fausses informations

Les autorités sanitaires maliennes sont également confrontées à un défi de taille : la désinformation. Des rumeurs et des fake news circulent parfois autour des vaccins, alimentées par des opposants. « Il est crucial de contrer ces informations erronées. Ce vaccin est sûr, efficace et ne compromet ni la fertilité ni la santé reproductive des jeunes filles », insiste Dr Diarra.

La ministre de la Santé, le Colonel Assa Badiallo Touré, a elle aussi réaffirmé la sécurité et l’importance de ce vaccin lors du lancement.

L’introduction du vaccin anti-VPH représente une victoire importante pour la santé des femmes et un pas vers un avenir plus équitable au Mali. En brisant le cycle de la maladie grâce à la prévention, le pays montre l'exemple d'un modèle de santé publique centré sur l'équité, qui protège les plus vulnérables et assure un avenir plus sûr pour les femmes maliennes. 


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