Relever le défi de l’accès à la vaccination des sans-abris de Bujumbura

La couverture vaccinale à l’échelle nationale table à plus de 80%. Une des raisons qui explique ce plafonnement est la difficulté d’atteindre les communautés les plus marginalisées. Nul besoin d’aller dans les endroits plus reculés du pays pour les rencontrer : c’est le cas des personnes sans-abris dans la capitale.

  • 21 octobre 2022
  • 4 min de lecture
  • par Diane Ndonse
Dans la commune Mutimbuzi dans la province de Bujumbura, les aides-maçons vivent dans des conditions précaires et font face à de nombreux obstacles pour accéder à la vaccination. Crédit : Diane Ndonse
Dans la commune Mutimbuzi dans la province de Bujumbura, les aides-maçons vivent dans des conditions précaires et font face à de nombreux obstacles pour accéder à la vaccination. Crédit : Diane Ndonse
 

 

Domitille Kwibazimana est une aide-maçon rencontrée à Gatunguru dans la commune Mutimbuzi, en province de Bujumbura. Un bidon sur la tête et venant puiser de l’eau dans la rivière Gasenyi, elle révèle que son enfant de trois ans n’a pas eu tous les vaccins. « Il n’a reçu que deux doses », explique-t-elle. Avec des moyens financiers très limités, cette femme manque de temps pour aller faire vacciner son enfant. « Nous vivons au jour le jour. Si la date de vaccination de mon enfant tombe un jour où je n’ai pas d’argent, je préfère ne pas y aller. Je dois aller chercher de quoi nous mettre sous la dent », confie-t-elle.

Cet avis est partagé par la plupart des femmes aides-maçons rencontrées au même site. « Si nous ne travaillons pas, nous risquons de manquer de quoi nourrir nos familles. Nous n’avons pas vraiment de choix », souligne l’une d’elles.

« Nous vivons au jour le jour. Si la date de vaccination de mon enfant tombe un jour où je n’ai pas d’argent, je préfère ne pas y aller. Je dois aller chercher de quoi nous mettre sous la dent. »

En cas de déménagement, les familles démunies et sans domicile fixe rencontrent des difficultés dans la vaccination de leurs enfants. En cause : le retour obligatoire au centre où elles ont fait vacciner leurs enfants pour la première fois. Ayant fait vacciner son enfant de quatre mois à Mutakura, Odette Tuyikeze, mère de deux enfants habitant dans une maison en construction à Gatunguru, a été contrainte d’y retourner après son déménagement.

Odette Tuyikeze
Odette Tuyikeze fait partie des mamans qui ont des difficultés à faire vacciner ses enfants.
Crédit : Diane Ndonse

« Dans une structure de santé dans la zone Kamenge, ils ont refusé de vacciner mon enfant. Ils m’ont demandé de me rendre à Mutakura », se lamente-t-elle, ajoutant que ce n’est pas chose facile, pour elle, par manque de moyens financiers.

Toutefois, ces femmes affirment continuer à bénéficier de la sensibilisation des agents de santé communautaire.

Les agents de santé communautaire en première ligne

Jacqueline Mashimango est coordinatrice de la santé à l’Organisation diocésaine de développement de Bujumbura (ODDBU) de Caritas Burundi et encadreuse de santé communautaire dans le district sanitaire nord de Bujumbura dans le cadre du projet Dagadaga Kibondo. Elle fait savoir que Caritas Burundi collabore avec les structures de santé pour renforcer la couverture vaccinale.

Jacqueline Mashimango
Jacqueline Mashimango, coordinatrice de santé à l’Organisation diocésaine de développement de Bujumbura.
Crédit : Diane Ndonse

Pour la sensibilisation, la principale stratégie utilisée est le porte-à-porte. Vivant dans chaque quartier, les ASC circulent dans les ménages pour rencontrer les parents ayant des enfants en bas âge. Les ASC doivent passer deux fois par mois dans les structures de santé pour s'enquérir de la situation vaccinale de leurs localités, repérant ainsi les cas d’abandon. Ensuite, ils retournent dans les ménages.

Des groupes WhatsApp pour assurer le suivi

Actuellement, la collaboration entre les intervenants et les ASC passent aussi par les groupements de ces derniers. « Ils sont regroupés en association. Dans le district sanitaire Nord de Bujumbura, il existe 7 Groupements d’agents de santé communautaire (GASC) », informe Jacqueline Mashimango. Pour elle, la communication devient facile entre GASC. « S'il y a un déménagement, ils communiquent via les groupes WhatsApp par exemple sur la provenance des familles ayant des enfants à vacciner. De là, le suivi devient facile.»

Quelques défis restent à relever, observe Mme Mashimango, pour les quartiers nouvellement créés qui n’ont pas encore d’ASC. Les agents qui s’y rendent doivent parfois faire face à l’hostilité des habitants qui ne les connaissent pas. Mais comme souvent, le temps fera son œuvre : une relation de confiance s’établira, et la santé des habitants, même les plus défavorisés, ne pourra que s’améliorer.

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