Le Tchad est confronté à une épidémie d'hépatite E : quel rôle les vaccins pourraient-ils jouer dans la riposte ?

L'Organisation mondiale de la Santé a récemment approuvé un schéma à deux doses pour la vaccination contre l'hépatite E en cas d'épidémie. Ce schéma pourrait-il être mis en œuvre au Tchad ?

  • 2 décembre 2024
  • 4 min de lecture
  • par Linda Geddes
Virus de l'hépatite E. Crédit : Bibliothèque d'images relatives à la santé publique (Public Health Image Library - PHIL) des Centers for Disease Control and Prevention - numéro d'identification : 5605.
Virus de l'hépatite E. Crédit : Bibliothèque d'images relatives à la santé publique (Public Health Image Library - PHIL) des Centers for Disease Control and Prevention - numéro d'identification : 5605.
 

 

L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a récemment déclaré l’existence d’une épidémie d'hépatite E dans la province de Ouaddai, à l'est du Tchad, avec 2 092 cas suspects et sept décès signalés entre janvier et avril. La plupart (95 %) de ces cas sont survenus dans des camps de réfugiés et des sites de transit proches de la frontière avec le Soudan, et plus de la moitié (53 %) concernaient des enfants âgés de 6 à 17 ans.

Les adultes âgés de 18 à 59 ans représentaient 24 % des cas. L'OMS estime actuellement que le risque de propagation est élevé au niveau national, modéré au niveau régional et faible au niveau mondial.

Les patients se rétablissent généralement en l'espace de deux à six semaines, mais dans quelques cas, la maladie peut s’aggraver et entraîner une insuffisance hépatique aiguë (on parle alors d’hépatite fulminante), qui peut être mortelle. Les femmes enceintes sont particulièrement vulnérables : dans cette population, le taux de mortalité peut atteindre 25 %.

L'hépatite E est une inflammation du foie causée par le virus de l'hépatite E (VHE). Le virus est excrété dans les selles des personnes infectées et se transmet principalement par l'eau de boisson contaminée. Il n'existe pas de traitement spécifique, mais l'accès à l'eau potable, l'assainissement et le lavage des mains peuvent réduire de manière significative le risque de transmission.

Les patients se rétablissent généralement en l'espace de deux à six semaines, mais dans quelques cas, la maladie peut s’aggraver et entraîner une insuffisance hépatique aiguë (on parle alors d’hépatite fulminante), qui peut être mortelle. Les femmes enceintes sont particulièrement vulnérables : dans cette population, le taux de mortalité peut atteindre 25 %.

Vaccin contre l'hépatite E

Un vaccin contre l'hépatite E appelé HEV 239 (Hecolin) est disponible en Chine depuis octobre 2012, mais il n'a pas encore été soumis à la préqualification de l'OMS, processus de contrôle qui garantit que les vaccins sont sûrs et efficaces et peuvent être utilisés dans les programmes de vaccination. L'OMS recommande toutefois aux autorités nationales d'envisager l'utilisation de ce vaccin pour combattre ou prévenir les épidémies.

Pour pouvoir riposter rapidement aux flambées épidémiques, Médecins sans Frontières (MSF) a constitué, au début de l’année 2021, un stock de 50 000 doses d'Hecolin qui a été utilisé pour la première fois en 2022 pour aider à maîtriser une épidémie survenue dans le camp de personnes déplacées de Bentiu, au Soudan du Sud. Au cours de cette campagne, environ 27 000 personnes âgées de 16 à 65 ans vivant dans le camp - y compris les femmes enceintes - se sont vu offrir trois doses de vaccin, les deuxième et troisième doses étant généralement administrées un et six mois après la première.

Selon les données publiées dans le magazine PLoS Neglected Tropical Diseases en janvier 2024, la couverture avec une ou plusieurs doses de vaccin a atteint 86 % pendant l'épidémie de Bentiu ; la couverture avec deux doses ou plus était de 73 % ; tandis que la couverture avec les trois doses recommandées était de 58 %. Plus de la moitié des doses de vaccin qui n’avaient pas pu être administrées étaient destinées à ceux qui avaient temporairement quitté le camp pour chercher de la nourriture ou du travail.

Modification du schéma de vaccination

On ne sait pas encore bien si le Tchad va demander à utiliser le stock de vaccins d'urgence pour faire face à l'épidémie actuelle, mais si c’était le cas, la mise en œuvre d'une telle campagne pourrait s’avérer plus simple et moins coûteuse, suite aux derniers développements.

En mars, le Groupe stratégique consultatif d'experts (SAGE) sur la vaccination de l'OMS a recommandé d’utiliser un schéma de vaccination à deux doses d'Hecolin dans certaines situations (notamment dans les zones fragiles, en proie à des conflits ou vulnérables), au lieu du schéma complet à trois doses. Se référant à l'étude susmentionnée, il apparaît que les schémas de vaccination plus courts seraient non seulement plus pratiques, mais aussi plus économiques.

Le SAGE est parvenu à cette conclusion après avoir examiné les données de sept études antérieures. Il en ressort que deux doses administrées à un mois d'intervalle confèrent une bonne protection contre l'hépatite E, du moins à court terme, et que les réponses immunitaires durent au moins 8,5 ans chez les personnes qui ont été exposées au virus.

Le SAGE a également estimé que les bénéfices l'emportent sur les risques en ce qui concerne la vaccination des femmes en âge de procréer et des femmes enceintes vivant dans des environnements fragiles, en proie à des conflits ou vulnérables, tout en précisant qu’il était nécessaire de poursuivre les recherches sur la vaccination contre l'hépatite E au cours de la grossesse, ainsi que sur les sujets vivant avec le VIH et les jeunes de moins de 16 ans.