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On a parlé vaccins avec... Dr Issaka Yaméogo, médecin épidémiologiste au Burkina Faso

Médecin épidémiologiste, le Dr Issaka Yaméogo est chef de service de la surveillance épidémiologique à la direction de la protection de la santé de la population du Burkina. Dans cette interview, il nous parle de la situation épidémiologique de la méningite et des stratégies pour protéger les enfants par la vaccination.

  • 3 mars 2023
  • 5 min de lecture
  • par Abdel Aziz Nabaloum
Dr Issaka Yaméogo. Crédit : Abdel Aziz Nabaloum
Dr Issaka Yaméogo. Crédit : Abdel Aziz Nabaloum
 

 

VaccinesWork : La méningite est un problème de santé publique au Burkina. Comment peut-on la définir ?

Dr Issaka Yaméogo : La méningite est une maladie infectieuse et contagieuse causée par des germes pathologiques, parmi lesquels le méningocoque et le pneumocoque. C’est une maladie très grave qui tue, si le malade n’est pas traité à temps dans un centre de santé. Toutes les tranches d’âges peuvent être touchées, mais les enfants sont les plus touchés et les plus vulnérables.

Quelle est la situation épidémiologique au Burkina ?

Le Burkina est un pays situé dans la ceinture africaine de la méningite, une zone qui s’étend de l’Ethiopie à l’est jusqu’au Sénégal à l’ouest, qui a un climat particulier au cours de la saison sèche entre décembre et juin. On a l’harmattan qui est caractérisé par des vents chauds et secs avec beaucoup de poussière. Cela fait que le Burkina, durant cette période pendant laquelle souffle l’harmattan, est à risque en termes de flambée du nombre de cas de méningite et également d’épidémie.

Les données de la première à la 7e semaine de cette anné indiquent un cumul pour l’ensemble du pays de 296 cas suspects de méningite. Bien que nous ayons les 296 cas, aucun district sanitaire du pays n’a franchi le seuil d’alerte qui est de 3 cas pour 100 000 habitants. A fortiori, aucun district sanitaire ou zone de surveillance du pays n’est entré en épidémie ou a franchi le seuil épidémique qui est de 10 cas pour 100 000 habitants en une semaine.

« Les épidémies de méningite actuellement sont de plus en plus rares du fait de la présence des vaccins pour les enfants dès leur plus jeune âge, et de l’amélioration de la prise en charge des cas de méningite. Mais nous restons sur nos gardes parce que nous sommes dans une zone à haut risque »

Quels sont les symptômes de la méningite ?

Les signes dépendent qu’on soit enfant, nourrisson ou adulte. Pour les grands enfants et les adultes, les signes se manifestent par la fièvre et les maux de tête. Ces céphalées se manifestent également par une raideur de la nuque et la peur de la lumière, ce qu’on appelle la photophobie. Il y a aussi l’altération de la conscience qui peut intervenir chez le grand enfant ou l’adulte.

En revanche, chez le nourrisson, notamment l’enfant de moins de 30 mois, les signes se manifestent par un bombement de la fontanelle antérieure, un plafonnement du regard, une nuque qui est molle avec des convulsions. Même si le malade guérit, il peut garder beaucoup de complications après la maladie. A titre d’exemples, il y a la surdité, ou bien le guéri peut devenir muet, aveugle, etc.

L’un des moyens de prévention de la méningite est la vaccination, mais de trop nombreux enfants ne la font pas. Quelles sont les barrières qui font que certains enfants ne sont pas toujours vaccinés ?

Effectivement, l’un des meilleurs moyens de prévention est la vaccination. Mais il faut de prime abord souligner que tous les germes qui entrainent la méningite pour le moment n’ont pas de vaccin. Il y a des germes qui ont des vaccins et d’autres n’en ont pas. Pour les germes qui ont des vaccins, au niveau de notre pays, nous avons des vaccins qui sont déjà dans le Programme élargi de vaccination (PEV) : il s’agit de ceux contre la bactérie Haemophilus influenzae de type b, le pneumocoque et le méningocoque de type A. Donc les enfants, à leur naissance, peuvent bénéficier de ces vaccins pour être protégés de la méningite pour ce qui est de ces germes.

Si les parents suivent le calendrier vaccinal, cela permet de protéger les enfants pour le reste de leur vie. C’est important que les parents fassent vacciner les enfants conformément au calendrier du PEV dès la naissance pour ce qui est des autres maladies, pas seulement la méningite. Ces vaccins qui sont administrés dans le cadre du PEV sont administrés gratuitement dans tous les centres de santé.

Comment les épidémies de méningite ont-elles impacté le bon déroulement de la vaccination contre la méningite ?

Les épidémies de méningite actuellement sont de plus en plus rares du fait de la présence des vaccins pour les enfants dès leur plus jeune âge, et de l’amélioration de la prise en charge des cas de méningite. Mais nous restons sur nos gardes parce que nous sommes dans une zone à haut risque pendant certaines périodes, comme la période actuelle pendant laquelle souffle l’harmattan.

Les campagnes de vaccination des enfants contre la méningite sont-elles l'occasion pour donner d'autres vaccins aux enfants ?

Oui ! Pendant ces campagnes, ce ne sont pas seulement les vaccins contre la méningite qui sont administrés. Il y a beaucoup d'autres maladies pour lesquelles les vaccins sont administrés à travers ce programme. Donc ces campagnes de vaccination dans le cadre du PEV permettent d'immuniser les enfants, les protéger contre plusieurs maladies y compris la méningite.

Quel est le rôle des organisations de société civile et des autorités religieuses, coutumières, etc. dans la mission de vaccination ?

Elles appuient les autorités sanitaires à tous les niveaux (départements, communes, provinces et régions), accompagnent les différentes autorités dans la mobilisation des ressources en faveur de la vaccination. Elles appuient le personnel de santé dans les activités de communication pour pouvoir mobiliser au mieux les parents afin qu’ils adhèrent et respectent le calendrier vaccinal.

Quels conseils pouvez-vous donner aux populations afin qu’elles évitent la méningite ?

La prise en charge de la méningite se fait uniquement dans les formations sanitaires. Il faut évitez à tout prix l’automédication. Nous conseillons également d’éviter d’exposer les enfants à la poussière et aux vents. Mais au cas où ils doivent sortir, il faut les habiller convenablement. En cas de signes suspects, allez rapidement vers les centres de santé pour une prise en charge à temps et adéquate. Cela permet d’éviter les complications qui peuvent entrainer la mort ou à défaut des séquelles invalidantes.

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