Pourquoi tant d’enfants n’ont toujours pas accès aux vaccins essentiels
Des millions d’enfants ne reçoivent toujours pas les vaccins essentiels. Une nouvelle étude propose des solutions pour inverser la tendance.
- 1 septembre 2025
- 3 min de lecture
- par Priya Joi

L’Agenda mondial pour la vaccination 2030 (IA2030) est une stratégie lancée en 2021 pour garantir que chaque enfant ait accès aux vaccins qui sauvent des vies. Son objectif principal est de réduire le nombre d’enfants « zéro dose » – ceux qui n’ont jamais reçu aucun vaccin de l’enfance – de 25 % d’ici 2025 et de 50 % d’ici 2030, par rapport au niveau de référence de 2019.
Pourtant, en 2024, on comptait encore 14,3 millions d’enfants zéro dose – un chiffre supérieur au niveau de référence de 2019 (12,8 millions). Cette situation s’explique surtout par la lente reprise après les perturbations liées au COVID-19, en particulier dans les pays à faible revenu, ainsi que par la montée des conflits et de l’instabilité.
Avant 2021, peu d’études distinguaient les enfants totalement non vaccinés des enfants « sous-vaccinés » – c’est-à-dire ceux qui avaient reçu certaines doses mais pas l’ensemble des vaccins recommandés.
Parce que des solutions fondées sur les données sont essentielles pour relever ce défi, Gavi, l’Alliance du vaccin, et l’Université de Montréal ont réalisé la première revue mondiale de la littérature scientifique sur les enfants zéro dose depuis le lancement de l’IA2030. Publiée ce mois-ci dans BMJ Global Health, cette revue a analysé 82 études publiées entre janvier 2020 et janvier 2024.
Voici les cinq principaux enseignements :
1. Les obstacles à la vaccination sont multiples et complexes
La revue identifie comme principaux obstacles le manque d’intention de vacciner de la part des parents ou des aidants, les difficultés d’accès communautaire (distance aux structures de santé, absence de programmes de proximité), ainsi que des défis socio-économiques et culturels plus larges. Parmi eux : faible recours aux services de santé maternelle, insécurité économique, marginalisation, et faibles niveaux d’éducation ou d’alphabétisation des mères.
2. Les recherches existantes décrivent surtout la prévalence des enfants zéro dose ou les obstacles à la vaccination – mais évaluent rarement les solutions
Si la prévalence, les facteurs de risque et les obstacles sont bien documentés, l’article souligne en revanche un déficit majeur de données sur ce qui fonctionne concrètement pour atteindre et vacciner ces populations.
Parmi les 82 études examinées, la grande majorité portait sur le recensement et la localisation des enfants zéro dose, ainsi que sur les raisons de leur non-vaccination. 73 études apportaient des données quantitatives sur leur nombre et leur répartition, mais seulement 24 analysaient les obstacles à l’accès ou à l’adhésion vaccinale. Fait marquant, la revue n’a trouvé aucune étude publiée évaluant l’impact, le coût ou l’efficacité d’interventions spécifiques visant à réduire la population zéro dose, révélant ainsi une lacune critique dans la recherche en sciences de l’implémentation appliquée à la vaccination de routine.
3. Des interventions rigoureusement évaluées et davantage de recherche sur l’implémentation sont urgemment nécessaires
Les auteurs appellent à la réalisation d’études portant sur les stratégies de vaccination de routine ciblant les enfants zéro dose et les communautés non atteintes, en mesurant non seulement la couverture, mais aussi le coût, le rapport coût-efficacité et les effets sanitaires plus larges. Ces recherches sont essentielles pour éclairer les politiques publiques, orienter efficacement les ressources et combler le fossé en matière d’équité vaccinale aux niveaux local, national et mondial.
4. Les enfants zéro dose subissent des privations multiples et cumulées qui accroissent leurs risques
Les chercheurs constatent que les enfants zéro dose sont surreprésentés dans des familles et communautés confrontées à un cumul de limitations sanitaires, économiques et éducatives. Le faible statut socio-économique (signalé dans 29 études) et le faible niveau d’éducation ou d’alphabétisation maternelle (signalé dans 28 études) apparaissent particulièrement fréquents. Les formes de privation varient fortement selon les régions géographiques, les groupes de population et les contextes locaux – ce qui souligne la nécessité de stratégies sensibles au contexte et capables de répondre à des facteurs de risque multiples et imbriqués.
Pour aller plus loin
5. Des approches plus transformatrices et intégrées sont nécessaires pour parvenir à l’équité vaccinale
Plutôt que de se limiter à des améliorations progressives de la couverture vaccinale, l’article appelle à un changement vers des stratégies intégrées capables de s’attaquer simultanément à plusieurs dimensions de la privation. Les interventions doivent être adaptées aux contextes locaux et conçues pour fournir des services de santé en parallèle d’autres formes de soutien social – comme l’éducation maternelle, l’autonomisation économique et les actions de proximité communautaires – afin de lever l’enchevêtrement d’obstacles qui maintiennent les enfants zéro dose en dehors de la vaccination et les enferment dans des situations de désavantage.
Cela suppose des partenariats avec les communautés, une action multisectorielle et une évaluation globale des résultats, allant au-delà de la seule mesure de la couverture vaccinale.
Davantage de Priya Joi
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