Vaccination de routine et lutte contre le paludisme : une alliance gagnante pour la santé des enfants du Bénin
Au Bénin, le paludisme représente 40 % des consultations externes et 25 % des admissions dans les hôpitaux pour complications. C’est dans cette optique de réduire ces taux préoccupants que, dans les hôpitaux publics et parfois privés, les mères ayant fait vacciner leurs bébés jusqu’à 9 mois reçoivent des moustiquaires imprégnées.
- 5 septembre 2023
- 5 min de lecture
- par Edna Fleure
Une double approche qui porte ses fruits
Le Bénin, avec ses deux saisons pluvieuses et deux saisons sèches au sud, demeure un pays où le paludisme demeure la principale cause de décès chez les enfants. Si la situation est relativement sous contrôle en milieu urbain, elle devient plus complexe en milieu rural et lacustre. Plusieurs mesures sont prises pour venir en aide aux enfants qui demeurent avec les femmes enceintes, les plus exposées au paludisme.
En 2019, selon les chiffres du Programme National de Lutte contre le Paludisme (PNLP), le pays a enregistré 2 515 000 cas de paludisme, dont 3 234 décès. La Dr Aurore Ogouyemi-Hounto du PNLP plaide pour un engagement au plus haut niveau des autorités de l’État et une implication plus poussée des organisations de la société civile et des communautés à tous les niveaux, soulignant que la lutte contre le paludisme nécessite une intervention multisectorielle et des stratégies innovantes.
« Grâce à cette technologie, 17 types de vaccins sont conservés efficacement dans notre centre de santé, et ce sont ces vaccins fiables qui sont administrés aux enfants. »
Ainsi, en plus des campagnes de sensibilisation et de la distribution annuelle de moustiquaires aux populations, les hôpitaux publics, en particulier, fournissent des moustiquaires aux mères afin de les encourager à préserver la santé de leurs enfants. Cette initiative vise également à persuader celles qui hésitent encore à faire vacciner leurs bébés. Dans des localités telles que Sô Ava, située à quelques kilomètres de Cotonou, où la résistance aux vaccinations est connue, cette approche porte ses fruits.
Par exemple, d'avril à juillet 2021, un centre de santé de proximité a enregistré 350 cas de paludisme, dont 300 cas de paludisme simple et 100 cas de paludisme grave chez des enfants de moins de 5 ans. Il y a un an, les chiffres étaient plus alarmants, avec des décès signalés. Le Dr Augustin Sossou, médecin dans un centre de santé communautaire, témoigne de la difficulté de perdre un patient, en particulier un enfant, à cause du paludisme, et souligne la nécessité de sensibiliser les parents sur les précautions à prendre pour éviter de telles tragédies.
Cependant, grâce à cette innovation, les choses commencent à changer, suscitant la satisfaction du personnel médical, des agents de vaccination et des autorités locales.
Des parents hésitants désormais convaincus
Bella Azonsi, commerçante de vivres et de céréales, a changé d'avis après que la vaccination a permis à son fils d'éviter la rougeole. Elle milite activement pour sensibiliser les parents, en particulier les mères, sur l'importance de la vaccination pour sauver la vie des enfants. Elle raconte sa transformation : « J'étais très réticente à l'idée des vaccins. Mais j'ai changé d'avis. Nous vivons sur l'eau, où le paludisme est fréquent. J'ai vu de nombreuses voisines perdre leurs enfants à cause de cette maladie. Les complications sont souvent liées à l'anémie, et cela me fait peur. J'essaie donc depuis près d'un an de convaincre mes sœurs des bienfaits de la vaccination infantile. En plus de protéger nos enfants, nous recevons également des moustiquaires, ce qui est louable car c'est pour une noble cause ».
Pour aller plus loin
L'engagement de personnes comme Bella dans la sensibilisation, combiné à la détermination des autorités, a considérablement réduit le nombre d'enfants hospitalisés pour paludisme et a simultanément augmenté le taux de vaccination infantile. Le taux de possession de moustiquaires imprégnées a grimpé à plus de 90 %, contre seulement 30 % en 2021. Malgré cela, le taux de natalité reste élevé dans ces régions du Bénin. Avant l'initiative actuelle, le taux de mortalité dû au paludisme était significatif. Le gouvernement accompagne cette initiative en distribuant annuellement des moustiquaires imprégnées et en luttant contre les zones à risque, notamment en détruisant les gîtes larvaires dans les bas-fonds.
Néanmoins, des poches de résistance subsistent. C'est le cas d'Aline Agovou, revendeuse de poissons fumés âgée de 32 ans, mère de cinq enfants, dont un bébé de deux mois qui n'a reçu qu'une seule dose de vaccination. Elle craint que la vaccination ne rende son bébé malade, ce qui l'a amenée à refuser de vacciner ses enfants. Elle partage ses appréhensions : « Pour moi, plus de vaccination. Mon mari menace même de me répudier si je fais vacciner ses enfants ».
La lutte contre le paludisme occupe une place centrale dans le plan d'action du gouvernement. Bien que le résultat escompté ne soit pas encore atteint, des innovations et des efforts sont déployés au quotidien pour éliminer le paludisme, en particulier chez les enfants de moins de cinq ans et les femmes enceintes. Lors des manifestations de la 16ème édition de la Journée Mondiale de lutte contre le Paludisme, le ministre de la santé, Benjamin Hounkpatin, a souligné la nécessité de « lutter contre le paludisme avec la certitude de l'enrayer à travers un dispositif efficace basé sur l'investissement et l'innovation permanents », bien que nous soyons encore loin de cet objectif.