Le vaccin ROR peut-il provoquer l’autisme ?
En 1998, des inquiétudes ont été soulevées quant à un lien possible entre le vaccin ROR et l’autisme. Depuis, de nombreuses études de grande ampleur et de haute qualité ont montré que ce vaccin est sûr. Voici ce que disent les données scientifiques.
- 12 septembre 2025
- 9 min de lecture
- par Linda Geddes

Quatre études clés qui montrent que le vaccin ROR est sûr
- Une étude en population sur la vaccination contre la rougeole, les oreillons et la rubéole et l’autisme. Cette étude danoise de 2002 a analysé plus de 500 000 enfants et n’a trouvé aucun lien entre le vaccin ROR et l’autisme, quel que soit le moment où les enfants avaient été vaccinés, ni selon des facteurs comme l’âge, le sexe, le poids à la naissance ou le revenu familial.
- Vaccination contre la rougeole, les oreillons et la rubéole et autisme : une étude de cohorte nationale. Cette étude de 2019, portant sur plus de 650 000 enfants, n’a révélé aucun risque accru d’autisme chez ceux qui avaient reçu le vaccin ROR — y compris parmi les enfants ayant des antécédents familiaux d’autisme ou d’autres facteurs de risque liés à cette condition.
- Vaccins contre la rougeole, les oreillons, la rubéole et la varicelle chez l’enfant. Cette revue Cochrane de 2021, qui rassemble 138 études couvrant plus de 23 millions d’enfants, a conclu que les vaccins ROR et RORV (rougeole, oreillons, rubéole et varicelle) étaient très efficaces et qu’ils n’étaient associés ni à l’autisme ni à des pathologies graves. Elle relève toutefois un risque très faible de convulsions fébriles, ainsi qu’un trouble rare de la coagulation sanguine — ce dernier étant beaucoup moins fréquent après vaccination qu’après une infection naturelle.
- Les vaccins ne sont pas associés à l’autisme : une méta-analyse fondée sur les preuves d’études cas-témoins et de cohortes. Cette méta-analyse de 2014, portant sur plus de 1,25 million d’enfants, n’a trouvé aucun lien entre les vaccins — y compris le ROR et ceux contenant le conservateur thimérosal — et l’autisme.
Les vaccins comptent parmi les outils les plus puissants dont nous disposons pour protéger notre santé, et le vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR) ne fait pas exception. Au fil des années, il a permis d’éviter d’innombrables épidémies, tandis que la vaccination contre la rougeole à elle seule aurait sauvé environ 94 millions de vies depuis 1974.
Pourtant, comme beaucoup de vaccins, il a suscité des interrogations et des inquiétudes de la part d’une minorité de personnes — en particulier autour d’un lien supposé avec l’autisme. Pour répondre à ces préoccupations, des chercheurs ont mené de nombreuses études de grande ampleur et rigoureuses afin d’évaluer l’existence d’un éventuel lien.
Les résultats sont sans équivoque : le vaccin ROR est sûr et ne provoque pas l’autisme.
Voici comment cette certitude scientifique s’est construite.
Un vaccin combiné
Le vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR) a été autorisé pour la première fois aux États-Unis en 1971, puis dans d’autres pays au cours des années et décennies suivantes. Ce vaccin combiné a remplacé trois injections distinctes contre la rougeole, les oreillons et la rubéole, auparavant largement utilisées, toutes les données disponibles montrant qu’il était efficace et bien toléré.
Cependant, en 1998, un article de recherche a été publié dans The Lancet par un gastro-entérologue britannique, Andrew Wakefield. Il y décrivait 12 jeunes enfants qui s’étaient développés normalement, mais qui avaient ensuite présenté un « trouble du développement régressif », comprenant la perte de compétences en communication et des signes d’inflammation intestinale.
Dans huit cas, les parents ou les médecins ont établi un lien entre l’apparition de ces problèmes et l’administration du vaccin ROR, reçue quelques jours ou semaines auparavant.
L’étude était minuscule, reposait sur le souvenir des parents, et ne comprenait pas de groupe témoin d’enfants sans autisme — elle ne pouvait donc pas établir de lien de causalité. Wakefield le reconnaissait d’ailleurs dans son article, appelant à la poursuite des recherches.
Des chercheurs ont mené de nombreuses études de grande ampleur et rigoureuses afin d’évaluer l’existence d’un éventuel lien.
Les résultats sont sans équivoque : le vaccin ROR est sûr et ne provoque pas l’autisme.
Cependant, lors d’une conférence de presse, Wakefield déclara aux journalistes qu’il estimait que les vaccins contre la rougeole, les oreillons et la rubéole devaient être administrés séparément, plutôt que sous forme combinée.
La couverture médiatique de ses conclusions entraîna une baisse significative de la vaccination ROR dans certains pays, suivie d’une recrudescence des cas de rougeole. Au Royaume-Uni, par exemple, la couverture vaccinale est passée d’un pic de 92 % en 1995–1996 à moins de 80 % en 2003. Cette même année, 442 cas de rougeole y furent recensés — soit trois fois plus qu’en 1996.
Même si l’étude a depuis été largement discréditée et entièrement rétractée par The Lancet, elle a soulevé une question que de nombreux chercheurs ont prise au sérieux, les incitant à lancer leurs propres études pour examiner un éventuel lien entre le vaccin ROR et l’autisme.
Pourquoi les recherches d’Andrew Wakefield sur le ROR ont-elles été discréditées et rétractées ?
En 1998, la publication de l’article de recherche d’Andrew Wakefield affirmant un lien entre le vaccin ROR et l’autisme a déclenché une panique sanitaire dont les effets se font encore sentir aujourd’hui. Douze ans après sa publication, l’étude a été entièrement rétractée, à la suite d’une enquête du General Medical Council (GMC), l’ordre des médecins au Royaume-Uni, qui a reconnu Wakefield coupable de faute professionnelle grave. Il a ensuite été radié du registre médical du Royaume-Uni, ce qui l’a empêché d’exercer la médecine.
L’enquête a révélé que Wakefield avait soumis des enfants à des procédures invasives et pénibles sans l’approbation éthique appropriée, sans justification clinique, et sans disposer des qualifications pédiatriques nécessaires.
Il avait également omis de déclarer des conflits d’intérêts financiers — notamment le fait que sa recherche avait été financée par des avocats représentant des familles convaincues que le vaccin ROR avait provoqué l’autisme de leurs enfants et qui préparaient des actions en justice contre son fabricant, ainsi que le dépôt par Wakefield d’un brevet pour un vaccin alternatif contre la rougeole.
Une enquête distincte, menée par le British Medical Journal, a par ailleurs montré que Wakefield avait modifié de nombreux éléments dans les dossiers médicaux des enfants afin d’étayer son affirmation selon laquelle il aurait identifié un nouveau syndrome associant autisme et maladie intestinale.
Que disent les études réalisées par la suite ?
L’une des premières de ces études a été publiée dans The Lancet en 1999. Elle avait été commandée par la Medicines Control Agency britannique afin de vérifier s’il y avait eu une augmentation des cas d’autisme au Royaume-Uni après l’introduction du vaccin ROR en 1988.
Cette étude, dirigée par le pédiatre Brent Taylor de l’hôpital Royal Free de Londres, a identifié 498 enfants atteints d’autisme, nés depuis 1979 dans la région de North Thames, en Angleterre. Après avoir examiné les dossiers médicaux et vaccinaux de ces enfants, Taylor et ses collègues ont conclu que, même si le nombre de cas d’autisme avait régulièrement augmenté depuis 1979, il n’y avait pas eu de hausse soudaine après l’introduction du vaccin ROR.

Les chercheurs ont également constaté que les enfants développaient l’autisme à peu près au même âge, qu’ils aient reçu le vaccin ou non, et à n’importe quel moment, et n’ont observé aucun schéma de régression du développement dans les mois suivant la vaccination. « Nos analyses n’étayent pas l’existence d’un lien de causalité entre le vaccin ROR et l’autisme », ont déclaré les auteurs.
En 2002, une étude bien plus vaste, publiée dans The New England Journal of Medicine, est parvenue à une conclusion similaire. Elle a examiné les données de 537 303 enfants nés au Danemark entre 1991 et 1998, dont 82 % avaient reçu le vaccin ROR.
Comme l’étude de Taylor, elle n’a trouvé aucune preuve d’un risque accru d’autisme ou de troubles du spectre autistique chez les enfants vaccinés avec le ROR, même après avoir pris en compte des facteurs tels que l’âge, le sexe, le revenu familial, le poids à la naissance ou encore la prématurité. Le moment de l’administration du vaccin n’a pas non plus fait de différence.
Se pourrait-il que certains sous-groupes d’enfants soient plus vulnérables à l’autisme ?
Depuis ces premières recherches, de nombreuses autres études de grande ampleur ont examiné un éventuel lien entre le vaccin ROR et l’autisme — sans en trouver aucun.
L’une des critiques adressées à ces travaux était que, même s’ils ne montraient aucune preuve que le vaccin déclenche l’autisme dans la population générale, de petits sous-groupes d’enfants pourraient être plus vulnérables.
En 2019, le Dr Anders Hvidd, de l’Institut Statens Serum à Copenhague (Danemark), et ses collègues ont publié l’une des plus vastes et des plus concluantes études à ce jour sur le lien entre ROR et autisme, qui répondait précisément à cette préoccupation.
Pour aller plus loin
En analysant les données de plus de 650 000 enfants nés au Danemark entre 1999 et 2010, l’étude n’a trouvé aucune preuve que le risque d’autisme soit plus élevé chez les enfants vaccinés que chez les non-vaccinés — y compris parmi ceux ayant des antécédents familiaux d’autisme ou d’autres facteurs de risque, tels que des parents plus âgés, une mère ayant fumé pendant la grossesse ou une naissance prématurée.
Les chercheurs ont également examiné l’existence éventuelle de regroupements de cas d’« autisme régressif » — où des enfants semblent se développer normalement, puis perdent des compétences comme le langage ou l’interaction sociale. Ils n’ont trouvé aucune preuve de ce phénomène chez les enfants vaccinés.
Qu’en est-il des études contradictoires liant le ROR à l’autisme ?
À côté de ces études extrêmement vastes et bien conçues, d’autres travaux, plus modestes, ont affirmé avoir trouvé des preuves d’un lien.
La meilleure façon de donner du sens à des résultats apparemment contradictoires est de rassembler soigneusement l’ensemble des recherches disponibles, de les confronter à des critères clairs et d’évaluer la solidité méthodologique de chaque étude.
Les revues Cochrane sont considérées comme la référence pour ce type d’évaluation en santé. Depuis 2005, les chercheurs de Cochrane passent régulièrement en revue et mettent à jour les données concernant les vaccins ROR et l’autisme.
La mise à jour la plus récente date de 2021. En plus d’évaluer d’éventuels effets indésirables du vaccin ROR, elle s’est penchée sur un vaccin apparenté, le RORV, qui protège contre la varicelle, ainsi que contre la rougeole, les oreillons et la rubéole.
Après examen de 138 études portant sur plus de 23 millions d’enfants, les chercheurs de Cochrane ont conclu que ces vaccins étaient très efficaces pour prévenir la rougeole, les oreillons, la rubéole et la varicelle — sans aucune preuve d’un risque accru d’autisme, d’un gonflement du cerveau (encéphalite) ou de toute autre affection prétendument liée à ces vaccins.
Ils ont toutefois mis en évidence un risque très faible de convulsions liées à la fièvre (convulsions fébriles) autour de deux semaines après la vaccination — soit environ une convulsion pour 1 150 à 1 700 doses de ROR administrées.
Même si cela peut inquiéter, les convulsions fébriles n’entraînent généralement pas de problèmes de santé à long terme. La revue a également identifié un risque très faible — environ un cas pour 25 000 à 40 000 doses — d’une affection appelée purpura thrombopénique idiopathique (PTI), dans laquelle le sang ne coagule pas normalement. Le risque de développer cette affection est bien plus élevé après une infection naturelle par la rougeole, les oreillons ou la rubéole.
Certains composants des vaccins sont-ils liés à l’autisme ?
Au fil des années, des inquiétudes ont également été exprimées quant à la possibilité que certains composants des vaccins — comme le conservateur thiomersal (parfois orthographié thimérosal) — soient liés à l’autisme.
Après examen de 138 études portant sur plus de 23 millions d’enfants, les chercheurs de Cochrane ont conclu que ces vaccins étaient très efficaces pour prévenir la rougeole, les oreillons, la rubéole et la varicelle — sans aucune preuve d’un risque accru d’autisme, d’un gonflement du cerveau (encéphalite) ou de toute autre affection prétendument liée à ces vaccins.
Un autre type d’étude utile pour répondre à une question de ce genre est la méta-analyse. Elle combine les données de plusieurs études indépendantes afin d’obtenir une conclusion dotée d’une puissance statistique supérieure à celle d’une étude isolée. Cette approche permet de déterminer si les associations observées sont réelles ou dues au hasard, et fournit une estimation plus précise du risque.
L’une des méta-analyses les plus souvent citées sur les vaccins et l’autisme a été publiée en 2014 dans la revue Vaccine. Les chercheurs y ont combiné les données de plus de 1,25 million d’enfants issues de cinq études de haute qualité, ainsi que celles de près de 10 000 enfants provenant de cinq autres études « cas-témoins ».
Ces travaux ont comparé des enfants autistes et non autistes afin de vérifier si l’autisme était plus fréquent chez ceux qui avaient reçu le vaccin ROR ou des vaccins contenant du thiomersal ou du mercure. Les résultats n’ont montré aucun lien entre la vaccination et l’autisme ou les troubles du spectre autistique.
Les scientifiques n’ont pas limité leurs recherches à ces composants : à l’été 2023, une vaste étude danoise portant sur 1,2 million d’enfants suivis sur deux décennies a évalué la sécurité de l’aluminium — parfois utilisé en très petites quantités pour renforcer l’efficacité d’un vaccin.
Cette recherche a conclu qu’il n’existait aucun lien entre l’exposition à l’aluminium dans les vaccins et un large éventail de maladies chroniques, dont l’autisme, l’asthme, les allergies ou les troubles auto-immuns.
Pris ensemble, l’ensemble de ces travaux offre une remarquable cohérence : le vaccin ROR ne provoque pas l’autisme. Si un petit nombre d’enfants peuvent présenter des effets secondaires bénins et passagers, tels que de la fièvre ou des convulsions liées à la fièvre, les risques restent infimes par rapport à ceux associés à la rougeole, aux oreillons ou à la rubéole.
Ces maladies tuaient ou rendaient invalides des milliers d’enfants chaque année, et les agents pathogènes qui les causent n’ont pas disparu : c’est pourquoi des flambées de rougeole surviennent dans les populations où la couverture vaccinale a baissé. Le vaccin ROR reste un moyen puissant de garantir la protection de tous.
Davantage de Linda Geddes
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